Au jour le jour 551


Au nom de la vérité nous brandissons toute complexité comme des hauts faits, quand il ne faudrait qu’une toute petite rigueur avec son infini de constructions pour expliquer tout acte, toute parole pris dans leur essence.

Tout devenir nous fait entrevoir comment il faut s’agiter, et combien il est ardu de ne pas se prêter à cette contamination.

Imagination : fille qui chante dévêtue dans une combe.

Au suicide j’ai préféré les faux espoirs, ceux que j’ai remâchés et ressassés, qui m’ont rendu oppressé et non oppressant.


C’est d’être en vie qui est une tare, la mort plus objective ne va pas jusqu’aux condescendances, ni jusqu’aux manquements.

Impulsif, irrésolu, je touche aux mots en vacillant, j’en sors avec l’intention de m’arrêter pour mettre Dieu dans mon viseur.

Sois bon prince ; est-il meilleur prince que celui qui halluciné se penche sur la raison pour en extraire de la glu ?

Entre la matière et Dieu nous avons érigé l’irréparable.

Tous les degrés de la perfection sont des degrés d’incertitude.

Toutes nos histoires s’expliquent par nos débordements et la lie qu’elles fécondent.

Faute d’excès à mon goût, je me répète que l’existence est un manque d’astuce, et j’y renonce pour me réveiller dans l’extase ou le scepticisme.

Vivre est de l’ordre de l’acharnement.

Le dégoût de nous-mêmes est un moyen de se soucier des autres et de leurs dégoûts.

Vie :trop plein de la matière, dégueulis des origines, épanchement de Dieu.

Tous les jours où nous sommes au sommet sont des compositions de l’ordre d’une littérature écrite sur le ton doctrinal d’une oraison.

Dieu fasse que je n’en finisse pas de m’exténuer !


J’ai bien mieux à faire que d’exister, oui, mais quoi ?


Nos raisons d’être sont toujours au dessus de nos raisons de disparaître, c’est pourquoi nous subsistons et nous nous leurrons.


Je me suis attaché à ne pas montrer toutes mes vacuités, toutes mes inanités, ce fut hélas dans ces excès que j’ai le mieux fait part de mes vides, de tous mes vides.


La mort est le taux d’usure de nos propensions à tout vouloir rendre éternel.

J’ai fraudé sur ma langue, mon langage aussi, poussé par ce goût maladif voire ordurier pour l’insulte ou l’interjection, j’admets pourtant que mon existence est vouée au virus d’une forme de parole que je décrie sans pouvoir m’en passer.

Entre temps, entre temps quoi ? Est-il un autre temps, et peut –on s’y immiscer dans cette stupide conviction qu’il est la plus parfaite des alchimies qui nous momifie à sa guise ?

En rupture avec les hommes, en totale rupture et depuis fort longtemps, qui s’en plaindrait, si ce n’est moi qui ,tant ce qui m’en a rapproché a été pénible ?

J’ai la sensation que j’abandonne, qui , quoi, je l’ignore ;mais cette sensation est si vivace qu’elle est la matière même de mes inconforts ,e mon éloignement, de ma simultanéité d’être proche et lointain pour aussitôt m’en plaindre.

Tout ce qui est sérieux est pour moi de l’ordre du phénomène, m’ennuie et me dérange ;ce degré de l’existence, que ne m’amène t-il pas à me dérober au monde pour entrer dans la maladie ou la grâce?

En dehors de ce qui nous épuise, l’acharnement qu’on met à être est un tour de force, que seule la réplique à la vie ,à toute forme de vie parvient à contrôler.


 
Je crois et je suis comblé.


Il arrive parfois que l’homme se trouve en inflation de la bête, la nature en est alors contrariée.


Plus mon corps se détériore, plus j’opte pour les péripéties de l’Esprit et cette fatuité de sensations qui m’élèvent ou me rabaissent.


La douleur s’ingénue à occuper tout mon vocabulaire, en dehors d’elle ne se reconstruisent en moi que les littératures d’obédience.


Vivre, c’est se consoler d’être.


Je ne discerne que ce qui fait que je me morfonds dans la peau d’un écorché.


Toute lucidité est corrosive, l’homme de tristesse et de peine cherche tout, sauf à tricher sur cette même lucidité.

La vie reste une option de la matière qui s’est préparée pour de plus grands projets.


Nul doute que toute objectivité passe par l’inavouable saloperie de l’image et des actes que l’on a traités comme tels.


Quelle déception que l’humilité, j’aurais dû vociférer, tout dégrader jusqu’aux veuleries ; je n’ai rien gagné à rester en dehors, à l’écart de tout, je veille sur toutes les maladies de l’existence en ne générant que des apparences .


Je ne fais rien qui vaille, je ne suis pas encore saisi par la vie.


Chiens de salut, est présent à nos yeux tout ce qui nous illumine, puis aussitôt se dispense d’être.


Quand tout m’apparaît vain, être en vie me trouble et m’oblige à quelques stérilités.