Au jour le jour 541


C'est sur le bassin des femmes qu'on rêve le plus de suicide.


Toutes les pensées qui se dissolvent dans mon cerveau sont des pensées sans écho et que la parole a préféré tenir à l'écart le temps qu'elles aboutissent avec exactitude.


Le langage a toujours le concours des imbéciles, et les imbéciles s’y agrippent sans préparation, piteusement, et cela m’est malaisé.

Je ferme les yeux, je suis marqué par les traits de ceux qui ne sont plus, une misère de plus à ma fidélité.

Suprême mensonge que celui-là « J'en ai marre « » et pourtant on continue à exister.

La violence de ma résignation est à l'origine de mes impropriétés, glaire et glu mêlées, pour une vaine conversation avec Dieu .

Accomplir du dire, s'y accomplir, et n'y trouver que la trace d'une ancienne vibration, qui altère nos voix et nos songes.

La douleur se suffit à elle même, et faute d'être, elle n'en est que davantage.


Comment éprouver ma lâcheté, si ce n'est en invariant, tout au long ce  parcours, que mes sensations de traîtrise ont jalonné comme en un bourbier ?


La vie n'est remarquée et remarquable que dans la fraude, et ces règles qu'on enfreint, pour entrer de plain-pieds dans une rigidité à haut risque.


Un exclusif de la façade, un pataugeur du dedans, et de l'intégrité, de l'intégrité pour des remous ou de la nausée.

Pressenti pour ne pas durer, tous mes suicides reportés n'ont été que de sombres humeurs, de sombres rumeurs aussi, la nostalgie de ceux ci parfois me happe encore, pour me marquer de ruptures et de vacillements.


 Etre dans un désert perpétuel,  où il fait bon douter, mais honorablement .


Mot après mot, passage après passage, gré après gré, de la rage, ou quelque chose de pire.

Ma fixité ne doit rien aux lieux où je me suis scellé ,mais à une peur ancestrale ,celle de rencontrer l'homme dans ses plus petits recoins.


Pourquoi être encore, si tout se qui découle de l'existence, n'est que foutreries et foutaises?

Je diffère une nouvelle fois un suicide irréfléchi, afin que cette infection me rende plus purulent encore, comme si j'avais eu à travailler dans une soufrière .


Sitôt qu'entré dans la rage, je m'appesantis sur mon néant, j'augure de l'irréparable, je vais dormir dans un confessionnal.

Ma vie a commencé par le poison, elle se terminera dans l'injonction ou le sang.

Etre tient du simulacre et de la rage, tous deux générateurs de cette même fureur de vivre .


Mon impertinence est un sauf-conduit, ma nature est toute entière dans ce discrédit, ce Waterloo, je ne m'en accommode que pour rester à jour, à l'heure, l'heure d'être moi et sans équivoque.


Perdre son temps et ruminer sur cette perte.

La mort c'est du rattachement, le nouveau lien d'avec la matière.

J'ai pris le parti de la folie douce, pour décrier le miracle de me savoir sain, mais illusoirement.

Je hais l'Homme,et plus je m'interroge sur cette haine, plus je lui pardonne, plus j'ai hâte de m'en éloigner.




Ce qui dans nos artères

A figure d’animal

N’est pas éblouissant

N’a pas atteint l’âge

Des magies et des songes

N’est pas encore sensible

A nos signes à nos gestes

Distingués dès l’aurore

Par un autre soi-même

Il est ce mouvement

Si bas si affaibli

Dans des contemplations

Qu’il ne sait pas encore

Toutes les messes domestiques

Avec leurs évangiles

De graisse et de graillure

Et que nous nous voyons

Victimes soumises

Aux transfigurations

Objets sans destinataire

Sales souillés étourdis

Portraits d’un monde

Sans nature conséquente

Où ne vaut de présence

Que ce qu’il reste de vous

Pour une autre correction.


Entre les basses portes

L’homme qui n’est plus lui-même

Secoue son tablier

Il dénoue ses sandales

S’il saigne encore

C’est une main gantée

Qui le pousse hors les murs

S’il veut parler c’est d’orages

D’étranglements

Il s’enfonce alors

Dans les courbes

D’une musique

Coiffeuse d’horizons

Plus douce que l’écume

Plus sombre aussi

Que les grands ducs

Sur l’écusson des nuits

Il tâte il cherche le trajet

Où il s’abîmera

Dans les bras de cette fille

Qui dormait

Entre les basses portes.


Je ne vivrai pas

Sans colère

Sans faiblesse

Sans productions

Sans mon poids d’entretien

Sans éclaircies

Sans motifs d’existence

Je ne vivrai pas

Sans mes vanités

Mes bredouilleries

Mes branleries branlantes

Mes soubresauts

Mes sous-bassements

Mes mécanismes

Sans ressorts assortis

Sans rire ricaner

A la barbe des moussons

Je ne vivrai pas sans effort

Sans forfaiture

Sans inventions

Sans intentions d’être

Sans le crédit qui m’appartient

Sans mes amis sans mes infantes

Je ne vivrai pas.

Sans enchantement..