Au jour le jour 526


A toutes les profondeurs abstraites vont les cailloux rêches et amaigris que l’ivresse d’un grand regard poignant a déplacés de nos fatigues pour des abysses sans enchantement ; là aussi la fatigue du serviteur rend compte de toutes les oiseuses convoitises, de toutes les volées de son cœur, et chacun de nos départs est salué par une femme qui a travaillé dans la bâtiment. Ayant détaché de moi le mot avec ses faces peintes prise aux schistes amers des saisons roturières, je palis dans un palais de glace à la vue d’un cercle de danseuses nues qui attendent qu’on les peigne avec la lenteur d’un officier de marine qui est un pourceau ombrageux


Je penche plus d’un côté que de l’autre, et si je monte aux arbres c’est pour y mettre un filtre qui transmettra mes coordonnées à des tireurs d'élites qui font la grimace devant les voiles triangulaires du levant, ils ont en main des masses de métal à base de carrés saillants et des chaussures plus élégantes  qu'une croyance erronée, leur activité sur le terrain consiste à lambiner pour ne pas faire l'erreur de travailler, ça tient de la réussite et de la fainéantise, c'est aussi une façon d'éducation reçue de leurs ancêtres qui subissaient la vengeance d'un dieu impressionnant qui procédait inconséquemment,tout comme  moi, autant dire que nos deux personnages ont une mâchoire de fer prolongée pour bouffer de la rouille.

Il y a de lourdes pensées, de lourdes sensations, elles sont dans celui qui veut écrire sur l'existence et ses dispersions, c'est un concept d'autodérision auquel il faut d'abord penser, puis se pencher sur soi, faire une photographie, déchiffrer les négatifs, tout ce qui ne va pas la couleur, peser la structure, les filigranes en noir, retrouver la forme exacte de la figure voulue, le noyau dur  de ce que l'on veut montrer, une présence, et si celle-ci est dans l'absence, comment s'y prend-on, on s'ouvre alors à l'expérience de l'invisible, de l'intime, de ce qui n'est pas donné à voir, et là on tient la poésie qui apparaît tel un centre,un ventre, une giration, en fait les nôtres, et le texte et la photographie sont sauvés.


Que s’arrêtent ici mes vaines ordalies mes apparences ma sainteté originelle mon infatuation ma tristesse celle où je lévite tel un type plein d’aisances et de drames n’a d’égal que le savoir rempli de lui-même qui n’a pas de successeur qui s’appesantit en moi par la somme des mouchoirs retirés de mes poches pour essuyer mes pleurs j’ai pressenti que dans toutes les formes mesquines des héritages l’intelligence ne grossissait pas ma pensée qui s’incline aux tourments se refuse à dérouiller ses chaînes il y a bien dans mes retentissements quelque façon de dire que je veux m’accorder a à Dieu voire aux hommes ce n’est hélas que la gestation d’un buveur honteux je cherche donc à devancer demain dans ma stupide avidité à vous retenir à lever vers le ciel mes prières mes psaumes prétextes à des joies vieillissantes je me fais fort de vous le montrer vous n’en retenez rien telle folie m’indispose une nouvelle fois telle folie est ignoble connaissance..


J'ai déjà entendu qu'on pouvait fouiller dans une âme considérable qui ne fait pas sa chochotte, qui n'enlève pas son enfant malade à un lit d'hôpital, qui n'étouffe pas ses harmonieuses notes, pour cela ,il suffit de laisser sa nature apparaître avec ses entrelacs, ses marées, ses rivières, ses sorbets d'eau courante sur le feutre des prairies, mais je prends garde à tous ces pièges, à ceux de ces rats avec une queue de vilebrequin, ils en disent de ces calembredaines, ils sont d'une humanité basse et affligeante qui ne se rase qu'une fois par semaine et dort avec tout ce qu'elle a oppressé une journée entière quand elle est allée aux mœurs légères. Moi ,bien observé, je suis un semainier malingre, cinq tiroirs, deux manquent, un saurien sur l'arbre aux ronces dentelées comme des encoignures, je tiens aussi de la camisole et du maquisard, la première pour sa forme, le second pour ses hauts faits, j’ai tant de hasardeux ,de nécessité ,de bravache à revendre que je n'apprécie aucune question quant à ces sujets, je ne veux pas davantage qu'on s'enquiert de mes plantes carnivores, de mes pentes inclinées, suspendues au dessus du vide, je veux qu'il en soit ainsi..

Nous migrons dans de bas silences lâches infatués nous remontons de l’ardente chaleur prise au ciel élargi des étreintes d’étrangères qui campent sur des versants effilés dans nos oratoires nous engendrons de piètres gloires doctrines d’affronts anciens nos enfants naissent et meurent dans des ramassis de cendres violettes prises aux dépotoirs de nos enfances sourdes de nos contrées sans coutume hier encore avec nos soifs et nos mercis nous relevions nos masques le grain aux hautes stances du vent était jeté nos courses butent contre les orages les sédiments les rampes qui ne nous retiennent plus de notre isolement rien d’ample ne nous saisit plus nous ne guérissons plus des morsures de ces aubes rougies au feu des rancunes nos immobilités et nos orgueils sont notre nouveau lieu le plus haut aussi voilà que nous cherchons à mesurer nos gestes et nos paroles pour battre contre le temps de notre tambour obscène.


Et s’il est un endroit contre le rempart des adolescences dans un train de marchandise au départ pour d’extrêmes orients , j’irais y moquer vos fortunes, ma censure sera mon adieu, la seule chanson de gestes qui ne ravira rien de nos communs souvenirs, de vos mensonges féeriques, l’été aura beau avoir mis des consolations et des consulats de fleurs dans vos cheveux, je n’y apporterai pas ma touche, je mettrai des pivoines glacées à votre regard et du poivre à votre bouche savante, agrémenté du rogaton des soleils morts. Je garde en mémoire cette chanson de la vitesse une fois que vos mains étaient pleines des larmes d’un chérubin baigné dans une eau cramoisie, celle aussi d’un christ nettoyeur de chiottes. A trop tirer les draps sur votre souffrance, vous avez oublié qu’un homme vous voulait vierge de toute autre déité infecte, qu’il voulait vous emmener sur des cotres pour entendre le tintement de l’eau et de son passé dans un pays qui fait encore vibrer les cordes et les voiles de ces ancêtres qu’on écoute parce qu’ils le sont…