Au jour le jour 483


Le seul moyen d’échapper au monde et d’y gangrener ses idées.

Il y a tant d’exercices que je n’ai pas voulu accomplir de peur d’y assécher la beauté.

Né vieux parce que ne voulant pas participer au monde, j’ai tourné mon esprit vers les belles ignorances, et j’en suis resté là, contraint qu’à ne figurer.

Mon orgueil a été le seul adjuvant qui ait détourné de moi tous les soporifiques de la parole et de l’entretien ,et ceci jusqu’à d’infinies profondeurs.

Mes agitations vont du tremblement aux tics, la variété de tous mes soubresauts à quelque façon de descente aux enfers, ou d’un Golgotha bas perché.

J’évoque toujours la fatigue qui m’a fait renoncer, aux objets, à l’amour, aux rencontres, à la connaissance, et si certains
élans m’ont rendu oublieux de ces soustractions, je les ai commis bien plus vers l’intérieur que vers l’extérieur.

Dans les rêveries sans excellence, quand le corps n’est plus d’utilité, nous pouvons comprendre ce que la vie attend comme égarements..

Ma conscience est de l’ordre d’une gêne et d’une ébriété, je veux bien admettre quelques nuances à ce pathos, mais rien de plus.

Dans ce monde où les divinités sont un surplus qui nous rachète de nos états larvaires, y a-t-il assez de prières pour qu’elles nous étreignent ou nous astreignent à les penser ?

L’ennui restera la forme goûteuse des excès, où j’ai regardé mon ignorance comme le seul rapport que j’avais avec le monde.

Sur le sein d’une femme ,la place d’un front constitue le plus doux seuil des enivrements, ou le lieu idéal d’un suicide différé.

Qu’ai-je retenu de ma mesure qui fut en harmonie avec les commentaires que je tins, si ce n’est celui d’avoir ressuscité de la paresse ?

Faut-il que la foi aille toujours vers les hommes ou vers Dieu ?



Malade de désespérer de moins en moins.

Dormir est de l’ordre d’une condamnation, veiller tient de la même supercherie ;c’est exister qui nous abuse tout entier, jusqu’à l’ultime retranchement.

Etre futile en profondeur.

A chacun sa fièvre, la mienne réside toute entière dans l’idée que je me fais de mon propre cirque.

Commettre, toujours commettre, dans sa manière de stagner ou d’avancer, mais commettre pour des sensations d’être.

L’œuvre qui en appelle à des commentaires participe de la noblesse et de la maladie, toutes deux semblables à bien des égards.

Timonier de mon ennui, combien j’ai transformé dans mes cimetières marins, de crimes en suicides, et de suicides en échappées célestes.

J’ai beau croire que les apparences sont une pente abrupte, ma réflexion me mène toujours vers ce point initial, qui est une descente plane ou un à pic sans profondeur.

J’ai perdu en lucidité ce que j’ai gagné en nostalgie, et tout ce qui me reste de mes anciens soubassements n’est qu’un décor qui s’impose par ses archéologies ostentatoires.

Je ne peux me soumettre à rien, cette expression traduit mes connivences avec cet autre rien auquel j’ai abouti malgré moi.

Derrière tout ce qui est visible, de la passion et des larmes, de la terre et de l’eau, de la sueur et de la morve ;bref, le spectacle insane de nos vitalités et de nos vanités.

Où que j’aille, et en quelque lieu où je me trouve, la fonction d’y être mal, cette forme d’infatuation est matière à ne pas en témoigner davantage.

En perdition dans cette existence où ma condition d’homme n’avait de délicieux que ses emblées, je me considère aujourd’hui comme un asservi qui se console de ses anciennes vertus en étant indulgent.

Je considère parfois l’existence comme une réponse que l’univers a conçu pour donner un pouls à ses immédiatetés.

Restons incurables ;c’est le seul moyen de n’être pas pris dans la faillite d’un mourir innommé.

Le dégoût de nous-mêmes est un moyen de se soucier des autres et de leurs dégoûts. 


Vie :trop plein de la matière, dégueulis des origines, épanchement de Dieu. 

Le silence incline à la lice. 


Secondaire, essentiellement secondaire, je puise dans mon néolithisme ce qui un jour me révèlera. 

Spectateur imparfait d’un présent qui se coule sans y parvenir dans des gloses ordurières, aucune de mes répliques n’aura ses essences dans le mode inférieur de la parole. 


Les nuances participent de l’effacement et du retrait, autant dire d’une modestie incarnée en décharge. 

Tous les artifices nous survivent, au spectacle permanent de nos simagrées, préférons l’idiotie inhérente à nos actes, et cet insupportable besoin d’être déçus ou incontentés. 


J’ai fraudé sur ma langue, mon langage aussi, poussé par ce goût maladif voire ordurier pour l’insulte ou l’interjection, j’admets pourtant que mon existence est vouée au virus d’une forme de parole que je décrie sans pouvoir m’en passer. 


Entre temps, entre temps quoi ?


Est-il un autre temps, et peut –on s’y immiscer dans cette stupide conviction qu’il est la plus parfaite des alchimies qui nous momifie à sa guise ? 

En rupture avec les hommes, en totale rupture et depuis fort longtemps, qui s’en plaindrait, si ce n’est moi qui ,tant ce qui m’en a rapproché a été pénible ?

 

J’ai la sensation que j’abandonne, qui , quoi, je l’ignore ;mais cette sensation est si vivace qu’elle est la matière même de mes inconforts ,e mon éloignement, de ma simultanéité d’être proche et lointain pour aussitôt m’en plaindre. 


Tout ce qui est sérieux est pour moi de l’ordre du phénomène, m’ennuie et me dérange ;ce degré de l’existence, que ne m’amène t-il pas à me dérober au monde pour entrer dans la maladie ou la grâce?  

Il y a des solitudes que l’on bâtit pour que tout y apparaisse ultime, ces solitudes tiennent de l’insularité et du précipice.

Ma vie aura été un agrément, sentiment céleste que rien ne devait y flamber, que rien ne devait s’en détacher, sinon une sensation d’indolence, donc d’insolence.

Dans la position d’un insurmené,je regarde les êtres comme des animaux sauvés du déluge, et qui s’ouvrent aux infinis de la condition humaine en rêvant.

La chair bourdonne d’affectivité, et nous séduit tant, que nous oublions à quelle éternelle absence elle nous convie par ses pâleurs.

Les idées sont des couleurs irréductibles, et plus elles éclatent, plus nos dégénérescences attestent des profusions dans lesquelles elles se dissolvent.

Dieu est le seul moyen que j’ai de transformer mes détachements en liaisons, et mes liaisons en déambulation.

Le suicide est le dernier stade de cette désolation où tout est si vague, que la monotonie même apparaît comme le degré ultime d’une insane volupté.
 
Chaque fois que je rencontre la fatigue, il me semble qu’attaqués au centre de leur décharge, mes os ne sont qu’un mélange douteux de lourdeur et d’infini, émanant des douleurs muettes où s’altèrent mes légèretés.

Quoi que je fasse ,j’y mets ma vue de la bière et du caveau.

Il y a des vies qui évoquent ces sombres sonates jetées dans des boudoirs, et d’autres, des hymnes funèbres sur des places de marché.

On rentre trop tardivement en soi.

Ma vie n’aura été qu’un vide d’afflictions et de contraintes.

Je distingue de l’absence ce mélange de frissons et de désolation, où mes verticalités s’éclaboussent de douleur et de frémissement.

Nous sommes tous des optimistes dans lesquels ont filtré de la vitalité et du souci.

L’amour est la clef de voûte de toutes les existences dégénérées par l’ennui.

Je rêve d’une neutralité viscérale dénouée de tous mes désaccords.

Dans la solitude tout est nocturne, et ce qui ne l’est pas, enveloppe nos larmes des couleurs de l’horizon, noyé de naufrages et de neurasthénie.

A quoi bon se déchirer dans l’ascétisme ou les dédoublements, quand il suffit de la géographie d’un corps qui marche sur un quai ?

Vivre c’est cracher du sang sur le monde et vouloir le noyer dans ses globules mêlés à la paresse d’un virus qui cherche impunément à se multiplier, avant de nous précipiter dans les océans violacés par notre douloureuse condition.


Toutes les décisions sont droites, et dans le confort de l’équilibre, elles révèlent leur suspension instantanée, et tous les guillemets des archipels de notre sang.

Je me consolerai de n’avoir pas eu ma place parmi les hommes en ayant celle-ci auprès des morts.

Primauté nauséeuse du corps quand il veut s’étendre et séduire.

Tant je n’ai pas voulu accumuler de rencontres, tant je me résigne à m’approcher de moi, de peur d’y trouver la trace de tous ceux que j’ai écartés, pour n’avoir pas à porter le poids de leur chétive destinée.

On remue tant et tant, que la faiblesse nous vient comme l’unique architecture qui ogive nos os.

L’ennui est la sensation pesante du corps quand il s’est trop rapproché de la règle ou de la marge.

L’essentiel en tout commence toujours par les solutions d’un devenir qui réconcilie l’homme et la religion.

Tous les jours que la banalité recouvre de sa chape d’aveuglement, je vais parler honnêtement de moi dans les bistrots et les bouges.

Je n’ai souvenir de rien que je n’ai gardé en mémoire, pour le surmener sur les ondes qui traversent les airs et mes os.

Dans cet espace ou mon retrait tient de la consolation et de la quarantaine, les abords sont trop cotonneux, et les arbres même ont le visage des connaissances mal éveillées.

C’est déjà trop que d’être ,comment faire pour devenir ?

Primauté nauséeuse du corps quand il veut s’étendre et séduire.

Tant je n’ai pas voulu accumuler de rencontres, tant je me résigne à m’approcher de moi, de peur d’y trouver la trace de tous ceux que j’ai écartés, pour n’avoir pas à porter le poids de leur chétive destinée.

On remue tant et tant, que la faiblesse nous vient comme l’unique architecture qui ogive nos os.

L’ennui est la sensation pesante du corps quand il s’est trop rapproché de la règle ou de la marge.

L’essentiel en tout commence toujours par les solutions d’un devenir qui réconcilie l’homme et la religion.

Tous les jours que la banalité recouvre de sa chape d’aveuglement, je vais parler honnêtement de moi dans les bistrots et les bouges.

Je n’ai souvenir de rien que je n’ai gardé en mémoire, pour le surmener sur les ondes qui traversent les airs et mes os.

Dans cet espace ou mon retrait tient de la consolation et de la quarantaine, les abords sont trop cotonneux, et les arbres même ont le visage des connaissances mal éveillées.

C’est déjà trop que d’être ,comment faire pour devenir ?


Pourquoi diantre secréterais je de l’existence, tout ce qui survit en moi en appelle à la chimie des écœurements ?

La lucidité m’a rendu précis, non loquace, c’est parce que cette faveur m’est donnée que je fais autant dans le prosaïsme que dans ses contraires.

La science par trop aboulique a oublié l’homme au profit du mépris de celui-ci.

Me convient ce qui ne triomphe pas, tout ce qui s’établit dans la certitude et ses hiérarchies n’a pas mes réflexions.

Toutes mes douleurs outre qu'elles traduisent quelque mollesse de mes intimes biologies, procèdent aussi du mal d'avoir mal été.

Ce sont nos fatigues, toutes nos fatigues qui nous font entrer dans la mélancolie et nous nourrissent jusqu’à la défection.

L’ennui a été une de mes résolutions, il ne m’a fourvoyé que lorsque je m’en suis délecté sans m’allonger, ni réfléchir.

Ma chair me mène parfois dans quelque extase que mon esprit tourne en virtualité isolée.

Entre la farce et le prodige, une altération de l’esprit et rien d’autre.

Rien ne me pousse plus à bout que cette position entre le vide terrestre et le vide céleste.

La philosophie a eu mes égards, de cette indiscrétion me sont venues quelques suffocations et quelques prières.

Fanfaron que la tragédie d’être pousse parfois jusqu’aux sanglots, il me faudrait exagérer tous mes crimes pour durer, mais je me ravise aussitôt rien qu’en y pensant.

Il faudrait chaque jour abuser de tout et n’en pas garder le souvenir.

Ma nature est dans la souffrance, elle seule ne me fatigue pas par ses systèmes et par ses bavardages.

Doute en degrés, je cherche dans la biologie un remède attestant de la suprématie de la fiole et du poison pour parer au raffinement, à l’excellence d’un doute d’introspectif.

Un à peu près par étapes, voilà ce qu’il me faut afin que j’aboutisse dans l’idéal du superlatif.

Tout regard en profondeur sur la littérature la dessert, restons dans cette inanité de la surface que la lettre ne réduit pourtant pas au sens.

La fatigue est mon seul département non immergé, lorsque ayant tout perdu me reste l’idée de la noyade, pour me divertir de ce Noé que je n’ai pas été.

Né pour m’entrevoir, pour m’entrouvrir, je me suis corrompu jusqu’à cette infecte séduction qui m’a promu dans les onomatopées.
Chiens inertes, pourquoi les crocs de l’homme sont ils si bien ordonnés, si ce n’est pour rogner sa propre chair?

Chacun se voit en majuscule.