Au jour le jour 433


Je le dis une fois encore, votre froide douceur comme une affaire qui ne sera pas conclue me mettait de bonnes partitions entre les mains, cette douceur venait de loin, peut être de vos dix ans quand senestre fut obligée à dextre, cela est douleur, elle revint dans un temps plus avancé et vous mit dans l’avantage de ceux qui vont grandir en de grands terroirs. Vous étiez dans la  certitude que je serai aussi de ce cru, vous cherchiez quelqu’un de raisonnable, ma raison fut toujours mal accompagnée, un peu de trouble à mes basques, un peu de nébulosité dans la cervelle, et puis tant de changements de température, cela ne vous alla plus, j’en suis resté là. J’ai souvenir d’avoir toujours eu des rendez vous avec la tristesse, c’est elle qui me seconde, une parité en somme, couple idéal, devenir un homme c’eût été pour moi de boiter, c’est devenir personne, quiconque, je vais porter plainte contre celui que je deviens…

Je me suis gonflé de votre amour, vous me nourrissiez, c’était votre gloriole, le monde était dans du froissement, nous fermions les yeux sur tant d’impudeurs et d’ignominies, ce que je voulais, c’était de rester à vos musiques savantes, à vos timbres, en fait, rien qu’à vous écouter, j’étais dans la certitude, certes parfois hésitante et chancelante, de notre durée, j’oubliais par trop fréquemment mon austérité, ma fatuité, mes substances perfectibles que je ne voulus jamais perfectionner. L’amour est science, est une région haute du cerveau qui se couvre d’étoles et d’étoiles dans les moments où il faut, lorsqu’on les oublie, les unes deviennent sales, les autres meurent de ne pas avoir été vues et acquiescées. Et puis il y eut toutes ces séances de semaine débutante lorsque je prenais le train, un peu en soutane noire, un peu en soute noire, je poursuis encore ce train avec une entorse au pied gauche jeté contre les butées de mon propre corps.

Le premier qui tombe entraîne l’autre dans sa chute, prince halluciné jeté dans un enfer une émeraude à son front, c’est ainsi que je me figurais, je me suis refusé à l’admettre, mais il s’agissait d’arriver à mon chevet dans une bonne constitution, j’ai beau eu le vouloir, je n’y parvins pas, mécontentement et déséquilibre m’y attendaient, on a beau faire le malin, serrer des mains, se mouvoir, avoir de la réussite plein les pattes, la folie est toujours au bout comme lorsqu’on emmène une bête à l’abattoir, ou lorsqu’on est égaré dans une foret et qu’il n’y a plus de sente à suivre, jusqu’où doit on alors repousser cet enfant endormi dans ses entrailles. Après il y a d’obscurs travaux à faire pour rallumer des mèches, combler des brèches, recoller les morceaux, la paresse mise triplement sur notre état larvaire, à raison d’ailleurs, parce que je suis resté dans mes assisses dans l’attente d’un jugement plus haut avec dans les mains des miettes à partager.

Et puis j’ai fait intervenir Dieu dans mes prières, vous savez celui qui est autant dans la valise que dans le voyage, dans un grand reposoir, vaste foutoir du ciel, dans chaque objet, chaque mot, chaque étreinte,  me suis tourné vers lui, quelle imbécillité puisqu’il est partout, nul besoin de bouger quoi que ce soit, je l’ai vu boudiné de poussière et de lumière, de mauvaise entregent, l’entretien fut bref, insulte à ma face devenue plus radieuse, enfin un hors de course, une autre fois encore alors que j’étais dans une église à vouloir piquer du cierge, je me vis petit et mal protégé, élevé par des morts dans le miracle d’être en vie et qui l’ignoraient, c’était donc ça que de vivre, assister à son existence du début à la fin, n’en rien présager, tout oublier ou s’en souvenir, dans les minutes qui suivirent j’étais accolé au bar, je voulais sentir ma carcasse s’ébranler, c’est ce qui advint, j’étais en renaissance.