Au jour le jour 392

 

Toujours moins limpide, moins clair, sombre mentalement, mes états comme des foudres d’enfants vous marquèrent profondément, je le savais, mais la lumière éclairait ce savoir, et c’était ce que je voulais, je repoussais celle-ci au-delà de nos rencontres, fallait-il que je fasse l’ange, moi qui suis bouffé jusqu’aux intestins par des démons qui ont la même soif que moi pour le même  dessein ,il s’agissait d’une délivrance à trouver auprès de vous, de votre chair, mais vous ne retîntes que mes  matières noires, la lie de mes opacités,  aucun de nous n’est plus dans la clarté qui va jusqu’aux angles et jusqu’aux recoins de notre sang, plus rien de nous n’est parallèle.


Il  y eut de la beauté dans vos mesures et dans votre demeure, nos mains jointes, le grand sentiment d’une faim l’un de l’autre, des promenades dans le grand froid, qui devint notre intime, un malveillant en somme, à se demander sans cesse ce que l’on ramasse dans le noir intense et qu’on oublie pas, on écarte son visage de celui de l’autre, c’est une somme de souffles coupés qui déboulonne  la poitrine, une forme de lourd sabordage avec de l’encre sur les doigts, quand la noirceur vient sans faire de bruit que pouvons nous retenir du mouvement qui la mena jusqu’à nos corps, rien, reste le rythme d’une vie pleine d’entraves.

Ce qui s’oppose au jour est un autre jour, et le rosé que je bois au goulot ne m’enivre plus, j’ai raccroché mes haillons et mes marches forcées dans un passé douteux où j’ai été surpris et aimé par des femmes d’un certain âge, dans la position de celui qui a un flingue en mains et des croches à son ceinturon, mon actualité n’est plus dans le vacarme, j’ai mis le droit au mauvais bord, là où on a le plus mal, ce ban de moi-même et de ceux que je chérissais ne vaut aucune justification, je veux dormir vite et loin, je sais que je n’atteindrai plus à la grâce de ces demoiselles qui se déshabillaient pour cent pfennigs , et comme toute vérité n’est pas bonne à penser, je voudrais  qu’une bouche adroite me morde, un peu comme celle qu’on voit à Rome aux côtés de hauts portiques et de colonnes de marbre, et de ne pas renaître m’est une belle idée.


 

 

Pauvre en ce plan doré

Où se coule ma maison

Je suis cet absent ivre

Devant un mur de chaux

Où nul écho ne rompt

Cette monotonie

Qui va de vivre à vivre

Sans être démuni

J’avoue qu’en voyageur

Qui change de pays

Je soupire et me lasse

Des gués et des passages

Tant à mes propres yeux

Je suis impropre et sage

Tout en ne serrant pas

Ce qui me fut commis

Je sais qu’en ma demeure

Nulle raison n’adviendra

Et voir ces longues routes

Qui vont dedans la plaine

Avec ses bas usages

Ses gorges souterraines

Me fait percer l’écho

Où retentit ton nom

Et de ce cafouillage

Extrême et vibratile

Je me mets à ce nombre

Où sont tant de victimes

Ces morts dont le visage

Est proprement le mien

Tout gonflé de veuvage

En de mornes matins

Quand les saisons de pierres

N’eurent pour édifices

Que de vastes cimetières

Tout remplis d’immondices…  

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En pleine marge dans les carreaux aux lèvres de charbonneux, j’écris gravement la lente procession du temps pour des jeux équivoques. Mes mousses, mes déliquescences, boire jusqu’à la santé insane des autres me ramènent aux inscriptions  grossières de mes trente  ans entretenus pour des filles gainées comme des ajoncs. Je ne garde aucune étreinte pour moi ,je les repousse vers les caisses de résonance de ce cœur qui rit de s’être tant indigné des duperies centenaires ,l’accablante lenteur de mon pouls me fait un bel avenir. Je vais gravir des montagnes , escalader des pics, m’envoyer en l’air ,en pomper,casser les burnes á  certains ,mais j’ai si peu de provisions que pour élever de poules et des pierres, il me faudrait quatre mains, deux pour saisir les pierres, et les deux autres pour viser les poules , si je ne les atteint pas, ce sera une méprise, le dur labeur de s’entretenir ne va pas qu’aux conversations. Je vais franchir le torrent, et voir ce qui se passe sous la vapeur des coches.

La belle invention que le grisou, ça pète, ça étincèle comme une lettre portée à l’injure, ça implose au-dedans pour des combats de minette et d’anthracite , ça fait coucou ,ça tombe à pic, pile là où il faut ,et puis les morts, du jamais vu ,de beaux morts ,écrins de chair rutilante, ça en jette un froid ,on pourrait en devenir fou, on finira toujours par l’être, les occasions ne manquent pas ,mais le grisou avec son air entendu, ses longues jambes soufrées, ses poussières de diamant, il est là dans le feu l’enfer central de la terre ,et les hommes le savent, et les hommes l’attendent, ils l’attendent si bien et si fort, que même en surface, l’horloge avec ses lustres ,ses guets, leur rappelle les sentences chtoniennes, la belle invention que le grisou, j’eus aimé que dans tant de demeures là où la cheminée sèche le sale linge des familles, il se déploie avec ses vapeurs et ses transparences pour de la pétarade ...