Au jour le jour 276 (1977)

Calme gerbe des eaux, c’est pendant que tu fus gardienne des rives d’écartement, que je brûlais d’obscénités dans des maisons boueuses….au doux soir des fontaines, des alphabets, des mots, tes bourgeons devisèrent, le feu honnit ses flammes ,réjouie dans ta chair et de tous tes excès tu te fis écolière pour te coucher dans des leçons d’apprentissage, avec les hommes aussi, minéraux des poubelles, des terrasses, des parquets stratifiés, imprudente que tu fus de ne jamais finir tes longs contournements…


Viens t’en vierge marine avec tes mains, tes ongles pour creuser dans le sable de nos versants opposés, viens t-en, obscure, fléchée comme un archange batailleur crâner sous nos cieux, là où l’oiseau emménage dans les créneaux obliques, dans les colzas, dans les soupentes, sous la pluie lourde de tous les zodiaques sans palmeraie, viens t-en louve, vestale, marraine des concordats prendre pieds et racines dans nos boudoirs bondés…


Pour t’écrire en filets, en violoncelles de sang, archet des blanches lames, j’ordonne des lignes planes à tes mains sablonneuses, l’eau nous creuse des baissières à dormir sous la lune, des maux de vieux seigneur qui se défait d’un diable, le ventre et les artères comme des crans de couteau, nous voici médisants, démons arrangés de l’ancien texte, pédés, cocus, rompus, à vouloir être bien avec ces anges qui n’ont de nid que leur pubis..


Avec tes longues mains pour te taper des dieux, fille des totems obscènes, des forêts et des nacres, tu savonnes nos peines comme chenilles à cocons, paumes rudes aux touchers des salauds qui se bandent, chair qui inonde de son sang les ports sur portulan, avec tes vastes jambes pour te parer aux jeux du fiel, de la rancune, des liqueurs et des entrevues.. avance , viens parler sous nos plafonds blafards…


Froid de voilure effroi d’orgueil, la neige se coud dans le silence, l’eau s’invente des mouroirs, les tours d’argent pèsent leurs crimes, jour à crosses, jours cossus…sur les toits blanchis de gel, des filles vont dans la distance, géométries osseuses à l’œil qui les multiplie, parité de tout mon mal, schiste sévère des tournoiements, quand terre et chair mêlées font le même testament…


Elle drague avec son môme les minets du seizième, paire et fille mère dans la même unité avec l’élément feu dans la bouche qui s’en charge, pelles roulées, sono, pipeaux, porto puis rat mulot…d’autres jardinent dans son meublé, slaves dormants dits pédés ou quelque chose comme ça, fille menue bien aimée sans forme italique, tu parles cul, tu parles con, impudeur synthétique avec tes beaux dessous, puis c’est bonjour bonsoir, le culte de l’albâtre, je dis, ô pauvre femme si mal illustrée dans un décor d’incendie et de craie…


Avec mes mots comme des remparts, toujours plus solitaire, je cherche encore à t’exposer, dans ton tailleur, dans cette laine, campée dans l’impudeur des filles de troupe sans leur médaille…tu es l’excès, mon lieu puni, la foule des femmes qui me reviennent de n’avoir jamais su les retenir, le mépris, la méprise et tout l’espace qui leur ressemble…


L’orage des sexes moitent nos tiédeurs, marches, barrières, bastions, non sens…tes seins sont des avalanches ,tes flancs, des murailles crénelées, cannelées, ici nous disons vrai, nos écumons nos variétés…à vingt ans, nos membres sont à l’écart des pudeurs ancestrales, nous traînons nos transparences comme des coutelas, des compas, des surins…haleines bleues des cibiches à deux balles, de nos respects extérieurs, quand nos signaux en morse nous dictaient nos erreurs…


Dans la buanderie, bonheur de te voir nue, comme un saule sans son écorce, désir marchand d’un autre espace, au miroir se tendent ton corps, ton cœur et ses méprises, toutes ces chairs étranglées en des garrots de permission, parcelles de peau pour des brûlures ;voici la douce joie du désespoir de te savoir éprise des mille esclaves du cagibi..


Il y avait Hélène animale en jurons, pour faire tourner la tête et se clocher la voix, phalène des vitraux aux fastes du corsage, Hélène époussetée, monument du survivre, qui achève d’achever toutes les vieilles mémoires, couteau pour apaiser la faim et la demande, fleur d’impatience cossue comme nos ignorances, Hélène fruitée à tort par d’autres tortionnaires…rien à foutre de ses soirs, de ses soieries, de ses étoffes, de ses velours, où pour un haut pardon les autres se ruent comme des livreurs…


D’autres fois elle insulte Dieu et ses saloperies et dit que sa morale est un foutoir qui fait du bien aux moribonds ;d’autres fois, mappemonde avec ses îles ses archipels, ses mains, ses seins, ses cuisses, elle est lucide de tant d’espace ;généreuse, idéale pour partager sa bouche, sa couche, bûcher aux feux saisis, et ses paumes ,guichets ouverts, fermés, ouverts, où nous payons cash le peu de paix qu’elle réunit…


Je mords un sein de savon bleu, bleu comme la neige de mes poignets, un sein d’affiche, de magazine, un sein de guêpe et d’hortensia, je mords un sein qui bat, un sein qui boue, un sein de brique et d’ardoise, fourré comme le fruit frais des arbres sans gâchette…belle bête enroulée en des torchons de soie lustrée, rage tenace et drapée aux posthumes détresses, corps d’avant le sommeil et d’avant le partir, d’avant le soc et le poignard, doux corps comme un galet bleu tendu à la langue, pour faire venir les mots et larguer les amarres, filon à pleines paumes, contrebasse au plus haut, boulet dans nos cœurs lourds de ne savoir prédire…


Le sommeil infidèle comme une femme infidèle me plonge dans son plumard…quand l’amour n’est plus qu’une culbute, un saut, une avance, un lapin ou quelque chose comme ça, le sommeil entre chez moi, boxeur du quinzième round avec les bras tombants, les yeux beurrés de noir, les lèvres tailladées, et c’est ce sommeil là ,fauché des heures premières, qui sait seul me couvrir les épaules de laine et les pieds de coton…


Comment ne plus te dire en ton nom de durée, tes espaces, tes clos, et ta chair de gitane, comment ne plus te dire, femme de pendant l’été, sommeil au sang d’oiseau, bouche aux lèvres taurines, jambes des rues sans faconde, comment ne plus prier tes délices, tes palaces et ton cœur, ce rouage imprécis qui bat en toute chose…


Il y a encore dans la salle d’eau le savon bleu de tes plongeons, les vitraux ocres de tes travers…toi partie ,mes veines ont soif de mer, et mes yeux verts se ferment, la clé de mes poignets n’est plus qu’une fleur de sang, l’image est morte sur ton nom, les dés craquent, osselets temporels, je te prolonge dans mes orages, ancienne antienne pour un pipeau, mon obstacle étoilé, mon insecte grouilleur ;hélas toutes ces cartes sur table ne m’inventent plus le monde, et mon amour fut-il de débarras, s’élargit de ma peine comme je joue du couteau…


Elle portait haut les seins comme des colliers de chair, comme des émaux de lait, s’amusait de mon sang noyé dans mes artères et donnait du mouron à mes chiens les plus sots ;rousse dans tous ses états d’épaisseurs et d’ogives, tombait en larges plaies ses anciens souvenirs, ceux du feu et du ruisseau de son deux pièces obtus quand elle était dormeuse…


Moue des seins dénudés en silence d’hôpital, ton torse m’offre des prières à garrots, des lacis de fontaine, des panaches d’oiseau ;puis c’est mon souffle court à ton cou, à tes aisselles ;tes jambes sont des carlingue huilées, ton sexe, l’outil brûlant de nos désirs, plus tard quand les aiguilles de nos doigts résolus blasonneront nos tempes, tu tairas chaudement tes hourras à la lune…


La serveuse temporaire se plonge dans ma vie, et ronge ma souffrance et cogne mon désir…ronces que je fais miennes d’un revers de la main, jupon maigre ténu aux jambes d’urine chaude, je trafique mollement dans ses yeux d’effraction, chaque mot nous déplie, nous creuse et nous entourloupe, chaque regard nous inculpe, nous dépiaute et nous joint, ses mains d’éclaboussures d’éviers et d’eau courante sont comme des éponges, pores des paumes savoureuses pour mieux s’agrémenter, pour tempérer le feu, distordre le hasard, seins de remue ménage, d’appels de louve moussant aux lavabos du cœur, visage de marbre rose, d’amazone et d’éclipse…et je lui appartiens dans toutes mes épaisseurs, dans toutes mes furies, mes meutes, qui sont tous mes envers ,qui sont tous mes adieux…


Où noyer ma misère, de quel pont me jeter, d’où balancer ma vie ;pourtant le pain est roux, a des mèches de mie, ta nudité fonctionne comme un quatrain lunaire, les mots sont crus et métalliques, chapelets de chair et d’os, la chance ronfle comme un monarque assoupi, les vœux sont marins et mariés, et pourtant le pourtant n’est ni oui, n’est ni non…