Au jour le jour - 264 (1977)
Une femme sans arguments se méprend de ses formes,l'ordre parle un patois ancien que le tumulte rend marchand,pont de fortune dans ma maison aux yeux de morte,tout est excessif,tout est brutal,seules les paroles abjectes restent encore dans le coût du temps,voici des passages,des passantes,des insectes qui déménagent,des souterrains,les manques de considération,les fautes d'esprit,que les filles mal renseignées rendent témoins de leurs médiocrités,voici les fausses vertueuses dans la posture de l'imposture,aimées pourtant comme d'imprécises pierres,qu'elles restent où elles sont,un ciseau contre le coeur,un autre sur la tempe.
Certains des gens que je connais profitent de me voir malade pour m’injurier, or je les sais irrespirables, puants comme goudron, mauvais comme chiendent ;que me vaut cette haine, sinon cette femme qui est riche d’elle en permanence..
Comme tu me démesures chaque jour davantage, je te réclame des artifices. La nuit venue, il faut que tu te déshabilles et t’offres nues aux mains de sel ;ni cri, ni larme ,ni peine ne doivent nous alarmer, le silence doit t’être familier ;il faut bien te punir de tous tes esclavages, petite femme déjà d’autorité que je ne sais par quel bout l’apprendre.
La nuit construit pour moi des palais de givre, ô mon amour humide comme les champs aux aurores, parle moi de ce que j’attends. L’ombre avec ses architectures chancelantes et son ciel de mosaïque, m’ouvre une vie nouvelle ;pourtant j’ai la passion si froide qu’il te faudra des mains inaltérées pour élargir dans ma tête les sillons de mes vieux rêves.
Le livre poussait. Les livres ont besoin d’espace et non d’accolement ;au moindre frisson le livre se dénoue et parle, il parle de ce qu’on aime entendre, une fois que le livre a parlé, il faut le refermer doucement, c’est une histoire qui recommence.
J’avais négligé une attente, l’attente se fit bocal, le bocal prit froid ,le verre cassa, l’eau s’écoula pour inventer un nouveau monde, le monde éclata de douceur, et tout recommença aux lendemains de givre.
Sous ce soleil de plomb comme j’ai pitié de toi, toi qui dans ces maisons paresseuses et sans âge te déshabilles, éteinte de toutes tes pierreries ,nonchalante et froide pour des yeux de derrière les vitraux, de derrière nos terroirs, comme j’ai pitié de toi, ma petite maladie.
Mon cœur était un passereau paresseux, sans mélodie, sans charme, sans ramage ;je le chassais un soir, l’insultant à tout rompre. Un jour, le retrouvai dans le corps d’un autre, frais comme une camomille, léger comme un papillon, vif comme un levraut, lui me maudissait ;je pleurais alors cet ancien élève du fond des premières classes.
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La nuit échelonnée
En longues maladies borgnes
A ses flancs engourdis
Traîne des retrouvailles
Et des voix d’eau de pluie
Je ne sais des dépouilles
Que les paillasses froides
Les zéniths alourdis
A base de bleu de gris
Mais voilà qu’il me faut
Des milliers de symboles
Pour des contradictions.
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Au temple des propos
Amoindries par leurs cris
Les concierges palissent
Et sépoumonnent
Le vulgaire est saillant
Les vieux ne constituent
Que des tessons ardents
Vivent les chairs impures
Et le microsillon
Hélas les assassins
Ont des épaules lourdes
Des veines bien trop bleues
Pour ne rien supporter.
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Comme tout est invisible, nous voilà roi ou dieu osant toutes les approches. Aux palais doublés de feux, je préfère les bistrots gris du soir, où la grammaire est un énervement et où on finit centenaire pour avoir bien douté..
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Mon ange gardien
Saignait des tempes
Tombé d’une balançoire
Et puis voir dans sa tête
Des cornes des cornemuses
Et une rose universelle
Qui pèserait cinquante kilos.
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Quant au réel ce jour là, il ne fut pas plus réel qu’une pièce de cent balles sur un parterre de nénuphars, et chacun de décider proprement de son avenir..
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