Au jour le jour 230
A priori c’est un homme âgé qui se déplace comme un pion damné, un portefaix disjoint de corps et d’esprit, en réalité c’est un prince sans étau, sans bâillon, sans tenaille, de ceux qui se signent à l’abri des cornes, qui se grave sur les pierres un nom en altitude, se gave de suaves vocabulaires, se sert d’une serviette pour lustrer les élytres des mouches, ne se torche pas le nez dans les églantines, n’a ni maître, ni valet, pas de dame de compagnie, moins de drame encore, il a des dents acérées pour bien mordre les chairs succulentes, n’est pas embarrassé par l’existence, ne chiale pas dans les latrines après ses soulographies, s’endort en mandorle sur un ottoman bordé d’or et de chintz, avec en mains un livre qui décrit ses scènes…
A près mes mauvais grés, mes mauvaises humeurs, mes mauvaises manières de peinturlureur qui a vu danser et entendu chanter ses toiles, tant il a cru qu’elles étaient finies, me vient de la chaleur comme aux bienheureux. Il pourrait en être ainsi tous les jours où il faut se défendre des pires, mais de l’impossibilité à le faire suive quelques quémandes auprès d’amis qui ne s’en soucient guère, ces amis sont des rossignols, de merles, des faisans, de ceux qui exagèrent le bruit de la gâchette, alors parfois avec des plumes que je leur ai volées, je mets dans mon lit le sentiment d’un tableau bien étudié, d’un nu en souveraineté, de quelque chose de moins vide, et bien que je vois cela avec l’air de celui qui revient du bistro, je regarde les ombres, les ocre, les bleus ,les cyans comme des fontaines ou des océans, là où des naïades montrent le coté obscur de leur bienséance…
L’odeur de la dextre équivaut à l’odeur de la senestre, surtout quand la gauche arrive de la droite, et la droite de la gâche. Lors de différents contrôles aériens, j’ai vu des mulâtresses tenir la main d’hommes plus hauts perchés qu’elles, qui disaient que des jets s’écrasaient ou se télescopaient, aussitôt on les interna. Ces mêmes sont nos voisins, ils distinguent le tout du rien tout comme nous, se font du mouron, mélangent l’eau et le vin, sourient lorsque vous leur chantez des cantiques à la gloire d’un dieu dont ils ignorent tout, ne gobent pas de mouches, pas plus que d’alléluias,ces motets improvisés comme des injonctions aux rires, puis avec leurs doigts, ils veulent enserrer les nôtres avant de se mettre un coquillage à l’oreille pour entendre le bruit de la mer auprès de laquelle ils sont nés.
C’est un cotard protégé, avec des paluches de porc sanguin, gras, des épaules de beluga, des jambes patrimoniales et des yeux de boxeur qui s’enchante des désillusions de sa vie. A dix contre un, il sait qu’il n’est pas seul, et seul, il est le cul entre deux strapontins, il parade dans un manège avec des mêmes de cette engeance qui aime les torts, les rages,les inepties,les incongruités et lourdeurs des bureaucrates de métier ; tous ont d’affreux accessoires, les mots bien placés, ceux de la dérision ,de la décision, de l’ironie, ils ont de la phtisie plein la bouche, ils s’en gargarisent, ils n’y ont pas échappé. Restons en là, parce que ce cotard ne pourra plus embarrasse personne, dans le cagibi de ses rancoeurs, pas même nouer ses godillots tant il sera arthrosé, et ça me fait grand bien de penser que son seul luxe sera de na pas oublier…
Dans mes cahiers sans panorama je mets et décris des immondices, il y a ceux qui ne supporte pas la riposte, ceux qui vont aux sentencieux, ceux qui servent aux postulants, car les postulants ,ne l’oublions pas sont en marche vers la monarchie, ils y aboutiront à coup de boutoirs , de diffamations, ce sont eux qui aboient, tonitruent, jouent de la crécelle dans les couloirs, qui les longent, les prolongent une carrière durant, certains ne seront jamais majeurs, pas même majors, alors imaginez le boxon qu’ils font à vouloir se rendre visibles, ben en vue , verbeux en tous lieux ils grimpent sur les podiums, les estrades, ils s’y font mousser, chippendales à la défroque, et ils moussent, ils moussent tant et tant qu’ils en deviennent des Grégory Peck ventripotents, ceux qu’aimaient ma mère avant qu’elle n’apprenne que ce n’étaient que des savonnettes…
Quand soupe la servante
Dans les mains de ses maîtres
Il vient un mauvais pain
Un enfant sot se déshabille
Aux fenêtres grises
Se dissolvent
Les mauvaises mythologies
Dans cette maison vieillie
Qu’est la grammaire
Les mots vont à ces mêmes servantes
Qui furent nos mères
D’un rire diminué
Par l’homme qui les battit
Et ce n’est que bien vêtues
Que nous aurions
Aimé les connaître
Pour d’autres festins
Pour une autre destinée
Qui est la nôtre aujourd’hui
Dans le corps disgracieux
D’un schisteux
Pris dans ses formes les plus viles…
Comme un fauve pris dans les éboulis
Et qui mange du feu
Pour des manèges d’éclaboussures
Voici ma domesticité
Mes apparences
Mes louvoiements
Rongé jusqu’aux rutilances
Je vais dans la vie
Pour la fortune des roueries
Les pièges et leurs entrailles
Tout se qui se terre et se tait
Faut-il qu’épuisé je sois plus noir encore
Qu’une viande cérébrale
Qu’on a cramé dans l’impur vent
Où faut-il que je m’en aille
Pour d’autres rouages
Entre la bastonnade et le gibet…
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Aux adieux que brise l’ambage
Le corps a ses fortunes
Des hordes de mensonges
Qu’il emporte
Jusqu’aux plages troublantes
Des marges atrophiées
Là aussi où se pencheront des tours
Des soldats dans la redite
L’histoire avec ses chutes
Et ses délayages
Sur toute beauté absente
J’écris avec désinvolture
L’empreinte de mes fidélités
Celles qui n’ont servi
Qu’à des fixités sans foi
Et jusqu’à ma nudité je porte
Ce regard qu’elles posèrent
Là où il fallait que je me retire
Pour m’y corrompre d’elles
Et n’en rien oublier…
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Face à nos maigres alibis
En mains confondus
Avec nos yeux d’aveugles
Toutes ces nuits que l’on roua
De nos fébriles combats
Maintenant l’oubli
Des larmes
Ne nous rassure plus
Naufragés sans mémoire
Sous de vastes coupoles
Cieux lourds et rougeoyants
Avec nos calices et nos lies
Nous nous lamentons
Heurtés comme d’après boire
Quand de nos pèlerinages
Ne restent
Que l’infecte vérité
De n’être plus croyants
Visité par nos anciens crimes
A l’abject couchant
Nous nous agitons de spasmes
Pour annoncer
Des nouvelles éteintes
Aux torches de nouveauxcombats…
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Dormir
Au plus haut et noble de soi
Que tout reflue alors
Vers ce noir criard
Ce coucher sans fard
Ces brouillards étourdissants
Dans ce qui nous fendit
Ne retrouvons plus nos entrailles
Plus notre mémoire
Cette mandorle perlée
Que tout ici
Ne laisse aucune trace
Avant que nous ayons sombré
Gardé de nos enfances
Le goût du meurtre et de la carabine
Nos lourdes distorsions
Dormir
Au plus haut et noble de soi
Avec l’envie de se disperser
Dans les nuits
Sans souvenir et sans agitation…
Détruire
Saper sa raison
S’enfoncer dans l’affreuse mémoire
Là où des femmes
Grasses de leurs méfaits
S’alimentent
De perdre leur sommeil
Pour nous heurter
Par de lourdes missives
Vaciller s’effondrer
En vertiges en habits de fête
Salir tout ce qu’on vénéra
S’il est une offrande
Qu’elle n’aille plus à la donne
Qu’elle reste dans le tracé de l’obscur
De l’odeur nauséeuse
D’un courrier
Sans destinataire
Et de toutes ces fécondités dispersées
Où ne domine plus l’amour
Et ses sortilèges
Aller entre les tombes
Regarder l’éclat du marbre
Les fleurs fastes qui l’enjoignent
Puis veiller
Pour mieux s’endormir
A toutes les autres…
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Un siècle pour disparaître
Un siècle pour le construire
Pour de mêmes combats
Avec son langage et ses gestes de faune
Eclaboussé de brûlures
Avec à son front
Ce gardien de visage
La forme claire
Où tout est passé
Où rien n’a été entrepris
Sinon le passage des ans
Allez voir ailleurs
L’empreinte le bruit
Les sépulcres superposés
Où crève l’indicible teneur
De ce que nous fûmes
Et tant d’attentes à justifier
A trier au poignard
Et cet espoir infécond
Qui m’entreprend
Comme si je lui étais étranger…
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