Au jour le jour 202

Je sais si peu de choses

Et je voudrais partir

Fixer dans l’incertain

Un certain avenir

Et froid de couches sombres

Par l'amour oublié

Errer sous forme humaine

Le soir parmi les ombres

Ne plus voir les visages

Où roulait l’or des soirs

Profond comme l'ivresse

Ou comme le désespoir

Puis du lointain domaine

Où les herbes se plissent

Aller à la fontaine

Et y boire le calice

Rempli d'une eau torride

Qui tant me brûlera

Que je ne serai plus

Où me mènent mes pas.

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Les échelles embrouillées

Du temps rêvé qui dort

Glissent d’un noir côté

Dans l'impasse des tombes

Et chaque tête nue

Qui regarde le ciel

Est sur un barreau bas

Perdue inessentielle

Chacun de sa fenêtre

Voit cet autre qui meurt

Sans qu'il ait demandé

Une petite splendeur

Puis comme un livre mort

De n'avoir pas voué

Le lecteur à apprendre

Un peu de sa clarté

C'est un autre que nous

Qui fuit vers l'essentiel.

L'acide bogue demande des thèses géantes afin de noircir le ciel dans un coin exposé aux tremblantes picholines, dans l'obscurité chacun prend part à une conférence digne d'un évêque éleveur de yaks, et qui les conduit dans un laboratoire clandestin où on saignera les bêtes atteintes de cécité, pour cela il faut traverser les ponts, les vallées où résonnent les trompes de chasse et où se bonifie un chablis apprécié par tous ceux qui vont dans des colloques et à des vernissages, on entend aussi le long des lés des péniches battre l'eau, tirées par des chevaux qui flottent dans l'air avec des cheveux poivre et sel, ce qui divertit les femmes contrariées restées sur la berge et qui regardent sans aucune admiration et les hommes et les animaux s'enchâsser dans la boue.

Pour ôter les nœuds des draps il faut un certain nombre de qualités, un peu comme celles qui conviennent aux abatteurs de gibier juteux, les hommes de basses besognes avec un goût de pastis en bouche et des airs  de narval qui se font fort de dégouliner comme ces goémons indigestes lorsqu'on les regarde avec les yeux d'un bricoleur du dimanche, et bien qu'ils manquent de saveur et de piquant, ils  en usent pour se retrouver à quatre pattes à brouter l'herbe en tous points opposées à leur façon de rascasse blanche, qui résiste au feu en battant des ailes pour s'échapper des eaux profondes, et nous homme de peu de faits, de peu de foi, nous prenons dans la gueule une grande claque à chaque fois.

Ceux qui coupent les liens avec un os d’agneau n'ont pas écouté Myriam Makeba, ce sont des cobras hindous avec des renforts embarqués du côté de leur membrane sonore , on dit qu'ils s'épluchent en eaux vives et au vent mauvais en sortant d'un violon que des proches agitent dans un vagissement fait de doutes et d'alertes étouffants, au regard de certains, ces serpents peuvent avoir des dialogues qui fatiguent toutes les arlésiennes prises d'assaut et d'abnégation, outre-mer, ces mêmes sont comme des vers de foule pris dans un capharnaüm et vont dans le déclin,  leurs yeux comptables les cernent de leurs végétales langueurs,et qui les ont guidé le matin pour qu’on les engage à aller bosser vivant , plein de sainteté stupide.

Ceux qui se font la belle sont privés d'acier, c'est qu'ils sont déjà écrasés de tout leur poids et ont pourri nombre d'ambiances, même au-delà de nos frontières ces poseurs et tireurs d’une part de ciel cueillent du millepertuis à la Saint-Jean et se mettent sur la piste des divinités  qui ont des largeurs de percale et jouent cartes sur table en se  réincarnant en une caméra portative pour vaincre leur laurentienne timidité, c'est en cela qu'on découvre le revers des êtres qui ont souffert de la canicule, des hommes, de la cruauté de l'existence, celle qui les posa sur les estrades pour être vus dans leur nudité, puis traînés dans la boue pour en faire des statues auxquelles on mettra le feu, les passant dans un four pour les cuire à l'étouffée..

Ne croyez pas que je me développe brutalement pour vous retentir ma vie ,ma vie est litigieuse, mouvementée ,en baisse de moralité, et ce que je réunis dans mes recoins obscurs, ce ne sont que d’infects mondes qui n’iront pas au visage de ces filles sans qualité. Je pense sourdement que j’ai arraché et brûlé ma langue pour un vocabulaire et des bassesses sans parenté, à hauteur de morphine, ce qui m’a endormi à la destinée des hommes, ce que j’ai creusé au-delà de mes joues, c’est aussi mon esprit qui a de rhizomes indénombrables bouffés par des insectes fouisseurs, bouffeurs de fiente, de salives et de baves, qui m’arrachent à cette terre où j’essaye de me transformer pour être mesurable. Ma rage n’est plus de me débattre, elle est de n’être pas damné, dans la meilleure des formes obliques possibles, celle qu’on atteint dans le relâchement de ses muscles et de sa chair, pour cela il faut que j’insiste, que j’assiste à des rencontres, sans être inondé, débordé par ces pensées qui m’emmerdent.

De la déveine en toute chose et pour cela je préfère le couvert, tirer à moi mes ombres et mes nuits, mes colères, y entrer, m’y enfouir, y plonger en apnée, ne pas remonter en surface et que nul ne m’atteigne plus. Parce que je subis le monde ,je me veux nomade, là où je vais et poserai le pas, il n’y aura plus d’ornières, plus de nœuds, j’enrênerai mon rétif cheval à un arbre aux grands remèdes contre mon mal, détaché de toutes les surveillances, ne me verra que celle qui aura l’indécence d’une chaude caresse au plus bas de mon ventre, à ce corps tendu et inemployé. Avant que de voir le temps bouffer, rogner, dévorer ma conscience, mon bel exil, il faudra bien que je ne m’éveille plus à la douleur d’être un homme ,ce sera définitif, j’irai jusqu’à ce terme sans aucun entretien, définitif, pas amer, moins sot, moins meurtri, avec des reliefs plein les mains et le ciboulot, j’écrirai alors sur la mélancolie de ces filles qui n’ont pas voulu de mes aortes, de mes veines gonflées, celles aux savoirs croisés et qui font autorité, ces continentales qui dormiront peu, tant je saurais leur dire leurs mensonges, et dissoutes à elles mêmes, elles ne s’endormiront en moi que lorsque j’aurais un nouvel amour établi là où il faut, entre la cave et les sacristies.

A u prix qu'on paye pour la vie sans avoir le temps de dégobiller de se venger de ses hérédités, je vous jure que ça fout le bourdon, il aurait fallu naître sans parents, sans pensées, sans être segmenté ,aspiré par ses propres glandes ,trouvé sa place dans l'exercice d'exister, dans l'exacte dimension qui va de la chaîne à la chaise, j'imagine que mon âme ciselée par des couturières injurieuses n'en est que plus vermoulue, tant elle a remué entre les mites et les purulentes masses d'insectes haves arrêtées à mes tempes qui sont comme des alluvions jetés contre mon cerveau malade et cristallisé par des péremptions de temps sans mesure. Je dis qu'au prix qu'on paye pour la vie elle ne mérite pas qu'on fasse tant d'efforts, qu'il y a trop d'effronteries, de foutreries, de confrontations autour et en nous, je ne veux plus me perdre dans cette langue phosphorescente aux dents d'acier, au  sourire cannibale, appliqué, las, cauteleux, cotonneux, voilà où je veux en venir, voilà mon nouvel emploi, ma nouvelle préoccupation.