Au jour le jour 188


Putain d’amour
Avec tes entretiens
Tes ongles à les sabrer
L’abstraction sans faux cils
De nos sentiments gourds
Confiance subie et subite
Si je touche à tes pierreries
C’est de ta paume de tes mots de renégate
Que tu m’abats
Comme un chien lapeur de peurs et d’orages
Là aussi se réveille
Une femme
Crayonneuse d’espaces
Rogneuse de végétation
Au nom de mémoire oublieuse...


Putain d’amour
A nous ensanglanter
Egouttoir d’acier rompu
Qui secoue les sens
Les rouets du temps
Horizontalement
Avec des avancées cliniques
Des reculades de cyclope
En débandades de vue
Que tout ceci finisse
Dans le peu d’éternité
Que la lampe à brûler le jour
Le brûle le déchausse
Et que je m’en aille
Sur les places publiques
Dire ton nom
Dans le désordre
D’un nouvel alphabet.


Si douce et si sévère
Etoile vorace du souvenir
Jeu pommé sans surface
Avec des mains roidies
Aux sulfates aux fadaises
Des peaux miraculeuses
Froide perversité
De tes bras à tes genoux
Au giron adressé
Une pierre tombale
Et tous nos entretiens
Avec ta panoplie
De justicière gainée
Comme une fleurettiste
Toutes tes oppositions
Et toutes tes parallèles
Sont de magistrales mesures
Pour un noir apparat
Promesse d’une gangrène
Voici que je te vois
Jouet fleuri de désespoir
Dans tes humidités
De taies et de draps
Où s’éclaboussent
La vieille nostalgie
La sombre confession
Que je salis une nouvelle fois.

 
Comme je vous regardais assis dans la pénombre
Que mes yeux s’égouttaient sur le filet des heures
Il me vint à l’esprit un soir parmi les ombres
Que tout s’élargissait serré contre mon cœur
Alors je m’adressais à ce vaste avenir
Mon ennui ma langueur dans l’insondable espace
Se détachaient ma joie venait par vos sourires
Je priais vaguement les deux mains sur la face
Je ne reverrai plus cette chambre où courbé
Sur vos rives vos berges ô mes douces dorures
J’égrenais un amour sur le corps que j’aimais
Et les temps m’est douleur et le temps m’est parjure
Que ne revenez-vous me tenter quelquefois
Quand mettrez-vous vos mains dans mes cheveux défaits
J’oublierai qui vous êtes et j’aurai encore foi
En la femme inconnue à ma vie emmêlée.

*
Et je rêve attentif au désordre naissant
D’une femme assaillie que mon désir altère
D’un automne redoutable douloureux encombrant
Où elle sera encore tout le sel de ma terre
Je rêverai toujours la tête dans les nuées
A ces aubes venues après la noire obole
A ces nuits contagieuses à ce temps inchangé
Où j’ourlais ses cheveux encombrés de paroles
Je rêverai encore de ses immenses joies
Termes d’une vie tenue à l’écart des croisées
Quand sa blancheur altière dévoilait quelquefois
Tout l’ensemble d’un corps par moi seul contemplé
Je rêverai sans fin d’une femme imprenable
Ecrirai sur les murs son nom et ses atours
Que personne ne l’use que quiconque d’ineffable
L’emporte dans sa vie pour n’en rien faire d’amour.


Temps de l’obscur
Avec les infinis discours
De ceux qui crient
De ceux qui restent
Des tribuns et des amateurs
Des noués sous le ciel
Toi laisseras tu
Belle endormie
Sur les miroirs où tu te vois vivre
Blanchir la trace
De nos derniers festins
Et cette pierre que tu défais de tes ongles
Te servira t-elle
A dépolir mon nom
Pour cette haute récompense
Que tu voudrais
Porter parmi les hommes…
O haleur mal étreint
Avec tes mains broyées
Celle qui te hèle
Sur l’autre pont
Avec ses chaînes
Ses paumes ruisselantes
Quand elle crie ton nom
Parmi les voyageurs
Peut-elle sans s’acharner
T’emmener sur le versant
Calmer le feu qui l’enserre
Où se déversent
Dans la moiteur automnale
Tant de filles légères
Avec leurs prières
Et leurs ostensoirs
Ces anciennes compagnes
Que la décrue repousse
Dans le flux et le reflux
D’un sang qui lentement
Retourne à la terre.