Au jour le jour 150

Et nos enfants endormis dans le temps des hommes sont caressés par des filles écumeuses figures d’albâtre et de proue les nuits sont d’une monotonie de plaine l’air est un bord tranchant portant  il faut encore croire que les ponts sont bordés de ces plaintes d’esplanades et de boulevards avec leurs chants de mariage et d’éternité nos mains paresseuses ne vont plus à la lumière dirigée des phares pour y mettre les coques dans la lumière crue tremblante aucune livraison n’est plus insincère que celle qui est donnée à d’autres prévenances qui sont restées sur la berge pour tambouriner sur la peau des chaloupes nous nous gantons comme des voleurs nous couvrir nous vaudra t-il un chagrin une semonce un crachin un crachat ou faudra t-il que l’eau gèle pour que nous puissions rejoindre ces filles qui marchent dans le jour neigeux..

Quand les serpents hasardeux s’amalgament aux miroirs, ils ne sont pas mis en vedette, mais chantent dans des cuisines aux bas plafonds des airs de camomille et de limonade dans un temps où il fait moins de zéro degré plantigrade, ils ont des têtes de froide céréale et leur vue vaut huit points sur le dé du hasard, cette mollesse qui est la leur quand ils veulent se détendre vaut par leur égale propension à vouloir disparaître sans imbroglio sous nos couvertures, aussi celui qui cherche à faire des rencontres d’âmes n’a pas un prénom qui porte bonheur et qui s’écrit sans qu’on l’orthographie proprement, ce dernier a également des graminées dans la bouche ce qui le fait passer pour un funambule épris d’une batracienne, à voir les façons approfondies qu’il a pour se rendre au bal des intérimaires on se demande si cette manœuvre n’est pas un retournement avec son coté sombre et impair, la suite est une implication de bêtes bavardes au milieu d’un cénacle employé à faire de alliances avec l’Histoire.

La joie remuante et saisissante ne nous vint plus, les heures semoncières et de remue tête semblèrent une éternité mélancolique et sans fortune. A poursuivre l’image qu’on a de soi, à sans cesse vouloir la prolonger, ma présence ne fut plus qu’une pensée indiscrète et vague, un peu comme une raison obligatoire qui a pour devoir de dévorer les faux ciels, entre autres celui de par dessus notre couche. L’amour est le bloc de deux chairs, de deux êtres qui procèdent d’un bleu roi, de l’étincelle, de la merveille du découvrir, ceci nous l’oubliâmes, nos chansons mêmes étaient d’un deuil apparent et pourtant sans fondement réel, j’ai laissé mon âme dans une demeure par top silencieuse, vous vouliez mon cerveau plus charpenté, plus ouvert, comme celui d’un vampire contemporain et qui parle, je n’en était pas là.

J’étais trop en low coast, un peu trop froid, un peu trop distant, avec du chaud parfois et je vous le témoignais. Les ans passèrent, les cassettes de mon silence et mes arrivages étaient antidatés, vous, tous les soirs vous me téléphoniez pour signifier les petites choses d’une vie simple, j’y étais attentif, sans froissement aucun, votre timbre plein de ces notes que j’aimais m’était doux, le saviez vous, m’entendiez vous vous étreindre dans la distance, celle où j’écoutais des musiques légères comme de petits étouffements et étranglements à domicile.Econome par et pour les mots, mes gestes toutefois servaient d’intermédiaire, cela aurait dû vous mettre sur la piste de l’amour que je vous portais, soit, j’étais dans une fausse transparence, mais pas dans l’hallucination du n’importe quoi, je mène une bataille, une guerre nécessaires contre moi et j’ai peur.

Dans les beaux samedis pluvieux nos changions peu de nos appartenances au canapé, bêtes tièdes flanquées, enroulées dans un plaid, nous mettions nos regards là où il doit se poser, quelque façon entre la burette et l’ostensoir, la musique oublieuse nous établissait dans le bredouillement de quelques notes retenues, de la parallèle quoi, simple, étonnante, un peu comme une nappe d’eau d’où ne sort aucune bête monstrueuse. Les dimanches étaient des temps suspendus témoignant d’un départ, nous nous y enfoncions, nos dextres prêtes à retenir, à fouiller encore dans nos têtes pour y retrouver la trace des jours heureux, un peu comme nos mains vont à la terre pour des semences à y enfouir, à mettre au monde ce qui devrait s’engourdir dans l’après nous, tout ceci nous servit trois saisons, belles, étirées, longues en langueur et de douce éternité.

La joie est une mèche, un épi qu’il faut sans cesse remettre en place, nous le faisions dans un vivre savoureux, je le vois encore en vous comme une chute en avant dans mes bras qui vous retenaient, vous y teniez aussi à ça, nos mains se liaient et se déliaient, jeux d’adresse et d’attrape, lianes neigeuses de notre confiance, presque virtuoses du serrement. Dans la ville où je vous hâtais vous n’étiez pas à la bousculade, le temps pour vous était une rallonge avec de tardives randonnées dans les lieux de ventes, à votre couche nous attendaient les agapes et transports que la banalité des jours s’octroie et accepte puis lave à grands jets d’eau sale, c’était peu et tant, j’ajoute que ma chair était vivante au plus haut point de votre bonheur, beau cadeau pour un réfugié des sens et que votre croyance a souvent rendu plaisant.

Le monde est d’un ordre triomphant ,sot, blâmable, le nôtre avait de distinctes phrases et phrases, essentielles, celles qu’on attendait, et dans la dominante de nos éclaircies nous étions deux charmants visages se dévisageant, chacun à sa propre face étant le détenteur d’un plaisir à donner, le tangible besoin d’étreintes nous étreignait, rien ne m’est oublié, tout est intact, les ombres dans la chambre, la bougie qui s’effiloche, l’inventif tarot qui ne prédisait rien à table dès le matin, les cendres appliquées au sol, votre chatte résignée à me méconnaître, certes c’était une absence de paroles, étaient elles dans vos nécessités,je l'ignore, tout de vous est encore dans ma confusion, ma contagion, jusqu’à mes plus infimes souvenirs en votre présence, moi qui n’en disais rien, et ce rien me revient en plein visage pour un séjour dans un corps qui n’est plus dans mes comptes, mais que de batailles bien engagées et accomplies que je connus avec vous.

Sur les débarcadères de l’existence il y a toujours un bateau à pavillon noir qui nous mettra dans la distance et l’oubli, on ignore quelle erre sera la sienne, mais on pressent quelque chose de funeste, une longue croisière mal ordonnée, incomprise dans le prix du bonheur, j’y mis le pied, je m’y embarquais dans la houle et l’abattement, l’irresponsabilité aussi. Qu’y a t il de supportable aujourd’hui sinon mes relâches, les intermittences d’un cinoche à domicile et sans ouvreuse, un vain travail à fournir, de la banalité quoi !D’un peu plus haut et plus loin j’ai eu des colères, du désarroi, rien ne vous est parvenu, ceci revient parfois encore à coups de boire qui n’ennoblissent pas le hasard, mon corps encore moins, tant de façons de me bouffer, de me salir la cervelle,ma résistance tient de la plainte, de la crainte,du pardon mais n’en a-t-il pas toujours été ainsi?

Les grues sont en cendres, elles se ramassent avec un chapeau de feutre, le feutre va au bordel grimé comme une aubergine, l’aubergine glisse le long des jambes de caissières qui prennent l’ascenseur, l’ascenseur est occupé par Ponce Pilate et Marianne la gloutonne, le gloutonnerie se présente à une école  de cirque, le cirque fait d’heureuses mains, les mains vont à la dépiaute, à la pioche, à la faucherie, aux combats, à la contestation, la contestation est contestée, puis tout s’assouplit au bout du compte aux nombres impairs, les  cervelles ne sont plus rouées ou trouées, les sornettes de l’âme sont dites à voix basse, on met des moulins contre le ventre du vent et des enfant naissent avec les bras en croix…