Au jour le jour 76


Avec cette autre figure
De ton monde renégat
De tes exclamations
J’attends que le poignard
M’atteigne à la poitrine
Qu’il m’ouvre jusqu’au sang
Laisse voir
Les masses sombres de ma chair
Bleuie de désarroi
Que ma purulence
Cérémonieuse
S’écaille entre les nappes
Jetées sur de étals
Où les bœufs furent morcelés
Comme des déchets jetés
Dans le vivace vide
De ne rien devenir
Qu’un amour désappris
Au soir des voltes faces
Ses yeux dans le miroir
A se voir méconnu
Comme un bec immense
Une bouche de lapin
Écorché sur le sol
Qui n’a qu’un faible écho
Où chaque syllabe
Dit le mot le plus froid…

 
Inutiles et véreuses
En chaque objet tranchées
Voici les parallèles
Jumelles d’éternité
L’une aux douleurs intenses
Recherche le baiser
D’un judas contrefait
Aux nobles apparences
Qui aux ingrates mains
Se farde de méfiance
L’autre s’épuise encore
Aux images laiteuses
D’un rein comme haricot
De flamme dans un briquet
Et que l’acide urée
Salit en chaque lieu
Qui n’est pas destiné
Au prêche ou à l’envie
Toutes deux purulentes
Mûrissent à leurs oreilles
De nobles descendances
Des postures essentielles
Dans la distance vive
Qui va d’un seuil ouvert
Sur une salle obscure
Où l’unique concert
De leur voix maladive
De pronoms personnels
S’aiguisent à la dérive
De l’événementiel
Qui est la chair putride
De ceux qui laissés ivres
Dorment sur le trottoir
Tout imbibés de drames
Quand chacune s’enquiert
Dans de nouveaux passages
D’un âge où elle sera
Une adulte pommée
Avec au front des rides
Qu’elle n’aura pas gommées…



Les greffiers
Aux froides eaux
Ont des peines assourdissantes
Marches forcées de la ventouse
Ils vont avec leur corps savant
Aux épisodes diurnes
Des vies assermentées
Parades compliquées
Des mains basses sur la vie
Et chaque cliquetis
Est un aveu requis
Sur un tapis d’aiguilles
Paillasson retourné
Où des fientes s’insinuent
En illustres beautés
Et d’insinuations
Comme femmes adultères
Ils ont pris la fonction
D’être sexagénaire
Au jour de leur naissance
Sans nulle autre entremise
Que de miser  sur l’homme
Aux hautaines misères
Couleuvrin crapaudin
Le voilà qui enclenche
D’ineptes procédures
Comme en une maison blanche
Quand les écoutes en somme
Ont été dénombrées
Et qu’il faudra coupable
Ou mine à entailler
Voilà le coutelas
Qui durcit dans la main
D’un frelon résigné
Pâle mangeur de pommes
Et s’il faut chouriner
Celui qui s’ensuivra
C’est qu’il est temps hélas
De ne songer qu’à soi…


J’écris pour aborder
L’enfer bleu des sommets
Où mes pairs abrutis
N’ont de murs pour enceintes
Que le flanc innommable
Des bêtes courroucées
Et qu’ils ont fourvoyé
Aux distances établies
Dans les frissons de roches
Entre l’autel et l’étal
Où l’asphalte se creuse
Sous les pas des géants
Aux parodies sans nom
Là aux aubes diaprées
Ils se vêtent de mensonges
Et meuglent dans les postures
D’un gisant de stuc froid
Avec leurs ventres dépliés
Pour des ardoises fines
Qui les éventreront
Pour chacun de leur crime
Quand aux paroles absentes
Ils révélaient le nom
De cet autre malade
Terré dans son caisson
De futaie et de givre
Pour ne plus voir en l’homme
Qu’un cadavre de vivre
Pesamment démembré
Par tous les sortilèges
Quand il a dénoncé
Les blondes paraphrènes
Qui ont des sœurs jumelles
Auburnes de leur état
Aux hôpitaux du cœur
Pour un sale combat
Et mon double adéquat
A préféré se taire
Comme pour une larme fauve
Qu’il n’aura pas versé
En présence d’un lion
D’une vierge infernale…



J’ai un savant désir
Appliqué qui bondit
Aux rumeurs intestines
Des mégères accomplies
Assaillies par les becs
De ces mêmes complices
Sur des terrains en pente
Où chacune dévisse
D’un froid vocabulaire
Effronté en posture
D’amours crispées qui dorment
Devant les devantures
Contre le flanc immonde
De ces arithmétiques
Où chaque médiatrice
Se fourvoie dans l’oblique
Nécessité de dire
Des propos en licou
Pour serrer l’animal
En dessous des genoux
A d’autres corps ventrus
Vont leur corps sacrilège
Qui ne s’est abstenu
De quelque sortilège
Que des gredins de feutre
Aux immenses machines
Aux heures du repentir
Glissent sur leur poitrine
Tels des stylets d’airain
Ils gravent sur leur chair
La fente et le destin
Des sombres mammifères…

Je suis tendu vers toi
Pour le manger le vivre
Et me tenir debout
Tu m’édifies avec ta tendresse
Humide comme une main ouverte
Sur toutes les mappemondes
Où nul ne s’est penché
Qui vont donner à boire
Et à me regarder
Dans les tracés de chair
Où vieillir sera doux
Tu es mon insistance
La masse claire de mes veines
Où tu mets
Ta foi et ta lumière
Et tant d’années anciennes
Où j’étais triste
Ne sont pas moins profondes
Que ma colère d’être jugé
Par une autre que toi
Aussi avec des mots
Qui jamais ne te saccageront
Je te dis le haut chant
De mon innombrable intérieur
 Où je dis tu et vous…
 
De naissance et de mort
En nul ne suis confondu
Quand en base en sommet
Je me soumets encore
Pour déjouer ma vie
De tous les artifices
Ombres qui se refusent
De montrer leurs visages
Tant la douleur est proche
A tous mes voisinages
C’est encore à paraître
Comme en caresses impures
Que je ne fuirai pas
Cette autre qui approche
Et qui n’a pas douté
Aux nauséeux bonsoirs
Voilà qu’être à sa table
Est comédie humaine
Et de rengorgements
On souscrit à la peine
De devoir rassembler
Dans un corps douloureux
L’amour inconsolé
Et l’amour monstrueux
Comme en promesses vagues
Dans le vin et l’aguet
Il nous vient au langage
Un ignoble passé
Qui n’est pas notre faim
Qui n’est pas notre soif
Que nous devons porter
Comme un lourd havresac
Où se heurtent  des nuits
Comme des ricochets…

Aux scabreuses irruptions
En droites lignes tenues
Vont les étoiles mortes
Aux lueurs effilées
Cette étrangère qui dort
Sur la pierre affaissée
Cache t-elle un trésor
Une odeur oubliée
Est elle d’un cher visage
Clarté dans la ténèbre
En première attendue
Ou cette autre funèbre
Qui n’aura reconnu
Aucun voile qui tombe
Le soir en sa fortune
Dans d'âcres catacombes
Et aux brises marines
Un déchirement bleu
Laisse présager un crime
Aussi bien qu’un aveu
Et toi-même avouée
A ce qu’il faut dédire
Tu plonges dans un lointain
Aux flottants souvenirs
Si bien que redressée
Comme nageur sans étole
Sous un ciel apaisé
Aux multiples corolles
Tu laisses choir une vie
Remplie de stratagèmes
Comme une chère ennemie
Qui n’aura pas de peine…

 
L’impassible système
Des tenancières obscènes
Aux médiocres entrées
Et aux mugissements
De bêtes innommables
Est d’une nature vile
Et d’un combat brûlant
Elles s’avancent elles prédisent
Que les rues sont souillées
Que l’air est un chemin
Qui ne sera borné
Que par d’abrupts hommes
Au caractère ténu
Qui iront en aveugle
Aux poternes branlantes
Les voici en posture
De distances factices
Leurs mots sont lames blanches
Leurs ellipses des canifs
Qui me tailladeront
Dans l’arrière saison
Quand le cœur est à vif
Et non au diapason
De leurs déconvenues
Comme autant de morsures
Jetées contre ma face
Aux saintes écritures
Puis un orgue frissonne
Dans la pièce cernée
Les beautés sont mourantes
Et meurt l’éternité
De rester en désert
Parmi des âmes mortes
Comme on finit l’été
Un soir devant une porte
Qui se sera fermée
Devant l’esprit ouvert
Qui n’aura rien soufflé…


La vaine progéniture
Des chiennes fardées qui dorment
Contre le paillasson
Froid de leurs démembrures
Infiltrées aux façades
Des chalands qui s’y fondent
Les voilà travailleuses
A craqueler d’éveils
Leur sotte descendance
Confite dans l’appareil
Outrancier du mentir
Et d’une vérité sale
Une casserole tiède
Accrochée à leur queue
Elles vont à des mariages
Qu’on dirait monstrueux
Elles hurlent d’odeurs bossues
Leur soif de célébrer
La distance l’imposture
De leurs sales contrées
Aux nuits reconnaissables
Aux blanchiments des filles
Qui se sont réparties
Dans d’insanes patries
Rues et trottoirs où dorment
Des bêtes équivoques
Aux flancs acides qui saignent
De chers chourinements
Et des lieux qu’elles emportent
Vers le noble établi
Pour des cisailles d’aube
Des breloques de nuit
Il ne reste qu’un bois sombre
Tout tacheté d’écume
Où un mâle sanglant
S’est abîme l’échine…
 
 
A justement venir
Au ventre de ces filles
Qui s’endorment fétides
Contre un corps soutenu
Il n’y plus de couleur
Plus de chère retenue
Tout point est un liquide
Tout objet est obtus
Et la civilité
Quand elle vient à nos yeux
Est une putain retorse
De la poudre en cheveux
Celui là qui l’écoute
N’a grâce qu’à ses narines
Où il s’est enfilé
Un peu de naphtaline
Puis dans le lent passage
Qui va du rêve au cierge
C’est une immaculée
Qui rappelle une concierge
Et soudain par pitié
Sourd comme une pointe rouge
C’est un cœur qui se vide
Aux remugles des bêtes
Qui se sont rassemblées
Sous la lampe tempête…


N’auras tu en arceaux
Que de fausses musiques
Tonnerres machineries
Que la terre a portés
Tendus au tutoiement
Des bêtes mélancoliques
Un fouet à leurs flancs
Un autre dans les fourrés
Et en cette chère Babel
Les voix sont façonnées
Comme une glaise morte
Foulée à nos pieds mous
D’autres en années torrides
Vermisseaux de hasard
Reviennent à la lenteur
D’une langue moribonde
Et chacun dégriffeur
De pastiches chiffonnés
Se vêt d’un chapeau blond
D’une moustache dorée
Porté à la couleur
D’un idiome incertain
Qui ne survivra plus
Qu’au cirque du matin
Quand une étoile vaine
Apparaît et décrit
Au ciel l’orbe lointaine
Que nul n’aura compris…

Voilà une aile sainte
Aux affaires de la nuit
Palme d’un corps liquide
Secoué de fatigue
Qui conduit à tes mains
Charitables ordonnées
Ne sait plus que l’abscisse
De nos basses contrées
Où tournent en vains loisirs
Des oiseaux clandestins
Comme une plume au ciel
Se fraye un long chemin
Et tes yeux convenus
Voient l’orage et la fleur
Au diapason de vivre
Comme une vraie langueur
Qui va jusqu’aux marais
Où triomphe l’orchidée
Océane qui boit
Nos savantes rumeurs
Avec tous nos secrets
Et nos attachements
Quelque chose bouge encore
Dans les revers du vent
Et du museau humide
D’un animal busqué
Arrive la douce plainte
De nos intimités
Quant aux objets inertes
Au tapis d’herbes hautes
Ce ne sont que jouets
Sans âme et sans ressort
Qui meurent aux déjections
De tous les inconforts…