Au jour le jour - 29

Ne pas d’un mouvement

Trop abrupt trop raidi

Refermer dans sa main

Le songe le paysage

Tout le bleu de la terre

Où palpite l’aveu

Avec ses ponts jetés

Ses tremblantes manières

Le gris l’inenchanté

Où s’enchaîne l’indigne

Matière du réveil

De la nausée du temps

Ne pas d’un mouvement

Rebelle crépusculaire

Dans l’épaisseur des nombres

Où brûlent nos misères

Couper court au visage

Qui nous montre sa faim

Sa soif de dormir

Pour sortir de la nuit.


Si pour ce lent convoi

De ton corps obligé

Tu donnes ta solitude

Comme une arche tendue

Si pour être immobile

Tu marches sans tes gloires

Heurtes les seuils humides

De toutes nos pulsations

Qui changent ta nature

Si de ton sang bleuté

Le terme se dérobe

Limite ta raison

Autant qu’une fausse science

Si pour dire ton chagrin

Tu forces sur ta bouche

Les mots des astres morts

Que les signes referment

Sur leurs identités

Si pour couvrir la cendre

Tu élèves des bûchers

Que ta mémoire s’épure

Sous les traits d’une femme

Pétrifiée arrêtée

Au cercle incalculable

Si…

Je veux éprouver

Autre chose

Que l’ennui qui nous rassemble

Nous éclabousse

Quand ça va mal

Quand tu t’empêtres

Dans tes féminités

Je veux

Du déchiremen

Du porte à faux

La panoplie

Du prieur

Du conciliabule quoi

Et que mes mots

En disent plus long

Que nos éclats

Que toutes nos chaufferies

Nos états guerriers

Je veux apprendre

A tordre ton chagrin

Me foutre gentiment de toi

Et en toi

Jusqu’au confort.

Vos mains plus violacées

Que la flamme du chauffe- bains

Les voici étendues

Sur un corps

Dévasté par des désirs anciens

Fonctionnant d’un plein droit

Cuisseries et égoïsmes

Moi avec ma fournaise

L’ardente beauté

Délaissée pour des jeux d’orgueil

Je me fracasse la tête

Contre les tables

Les moralisateurs

Les sentenceurs

Les verdicteurs

La troupe des chiens

Faiseurs de dégoûts

Ici pour offrir mon ventre

A vos coutelas

Je n’avais pas de reproches

A vous formuler

Qu’un immense désir

Foutoir de mes impressions.

Tu m’as chié des pendules

Du meurtre

Moi je cognais contre les murs

Mes poings et ma face

J’y écrasais mon front

De temps en temps

Ma tristesse trop nerveuse

M’emmenait

Sur les trottoirs

Perte d’équilibre

Messes basses

Rien qu’une avancée

Terrassements

Brouillons entrelacs

Quelque chose de scandaleux

La pharmacie du sentiment

A quoi se raccrocher

Si ce n’est à cette belle tristesse

Aussi limpide qu’une eau

Que nul ne boira

Aux oueds

Quand les filles n’y allaient pas

Pour laver leurs tissus sacrés

Avec mes gestes maladroits

Tu me retrouvais

J’étais celui

Qui restait sur ses gardes

Ne s’agenouillait

Que sur cette belle image

Des filles qui vont laver

Leurs tissus secrets

Dans les oueds

J’ai mis au regret

La beauté qui s’engageait

A ne recevoir de dons

Que des dieux affairés

A tremper leur zgeg

Dans son trou

Sans psychologie

Sans converse

Sans ses humidités

Moi je le vivais mal

Leur versais à boire

Dans des verres de mica

Leur descendais le froc

Pour leur fourrer

De la poésie au cul

Ils m’en voulaient

Parfois leur ceinturon

Battait mon échine

Heurtait mon visage

Mais j’avais mis en bouche

Ses seins bien avant eux

Et du reste

Je me foutais…

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