Aphorismes 169

La raison nous rend furieux ou nous apaise, selon qu’on soit sous la coupe ou le revers de Dieu.

Toute démence réserve une part d’honnêteté que la raison fortifie et élève jusqu’aux élucubrations du verbe.

J’ai froid d’être et d’exister, dans cette frayeur de devenir qui me pousse dans l’exercice d’un exil futile, je conçois le temps comme la plus inespérée des prisons.

La vie ne m’a pas donné le tournis, je cherche dans la parodie des mots une façon de dégringoler dans l’Etre.

Moi ne me suffit plus.

Tout est faux, jusqu’au détachement qu’on prend pour s’en éloigner.

Rien de ce qui est tragique ne m’émeut, je ne pratique la larme que pour un départ ou une arrivée.

Il ne faut rien faire qui puisse nous réconcilier avec Dieu si nous voulons le tenir en face dans notre vie.

Rien qui ne vaille la peine d’être fait, voire compris ; de tout ce qui s’effondre je retire le caduc des existences qui se ruinent dans des éblouissements excessifs.

Toutes les certitudes puent, à défaut d’y renoncer totalement, j’opte pour cette convention qui veut qu’il n’existe que des apparences.

Le lourd dessein d’exister.

Tout pousse au suicide jusqu’au mot « Suicide » même.

Les nouvelles idées sont concurrencées par la putréfaction des plus anciennes.

Dieu me devient vulgaire lorsqu’il ne m’entend pas.

Dans la multitude des clichés qui s’offrent à moi, pour me venger de l’espèce à laquelle j’essaie de renoncer, il y a l’insulte et le crachat, le reste ne sert à générer que des apparences.

Méfiez-vous du monde qui par convention s’est associé au cercle, à tous les cercles.

Etre aussi hermétiques, que lorsque submergés par la colère, nous n’avons plus en bouche que le mot « Foutre » ou le mot « Dieu »

Le tourment m’apparaît comme une des formes de l’exaspération, que nous avons dévoyée, afin de la vouer à tous les simulacre de cafard.

Que de signes avant coureurs de cette fin nauséeuse qui nous a été promise depuis que nous sommes nés larvés.

J’ai plus à craindre de moi et de mon mépris, que de toutes ces maladies qui ne m’enveniment que pour des injures particulières.

Je suis un sceptique voué aux sarcasmes, je m’acharne pourtant à y voir le symbole d’une compétence qui ne doit rien aux organes ni à la chimie de ses compléments.

Nous devons notre infortune aux mots, toute première géologie qui nous lie à cette civilisation de roulures assujetties à la parlotte.

Charognards distingués que le mot élève systématiquement, tout nous échappe voire jusqu’au noyau même du mot.

La lucidité restera notre plus grande victoire et notre plus grand vice, combien j’aimerais n’être hanté que par le thème de l’obscurité pour tout refuser, tout !

La réelle douleur s’exerce au-delà de cette douleur, qui est un oreiller pour nos pleurs.

L’ignominie, au regard de toutes les saloperies de l’Histoire m’apparaît comme une réplique à la civilisation.

Toute tension avive notre sang, même nos sanglots ont quelques proportions de flammes.

C’est vivre qui nous pousse à la charogne, le devenir quant à lui s’organise dans la puanteur qui en résulte.

Il arrive des nuits où la barbarie du sommeil nous pousse à ne rêver que d’une inflation de la nature les plus salaces.

Etre le rameau dans le bec de la colombe et la proie dans la gueule du loup.

Combien j’aimerais entrer en contact avec tous les ratés de la croyance.

Je retiens de la prière qu’elle ne me fait ni voir ni sentir jusqu’où le venin de mes veines pouvait se renouveler.

Je me suis confronté à la religion pour convertir ma pitié en apathie, voire en une supercherie d’absolutisme.

Il n’est aucune épreuve qui ne soit inscrite dans notre sang.

C’est couchés que le monde nous paraît enviable, debout tout s’évanouit en sentiments.

J’ai essayé le bonheur et ses variétés, je préfère me saborder dès aujourd’hui plutôt que d’y bouger dans le souci de n’indigner personne.

L’intelligence passe par les glandes, je me borne dans cette suprématie, mais ne me satisfait pas dans la dynamique de toutes les exigences qu’imposent le sang et la sanie.

C’est par étapes que j’ai entrepris de ne plus rien entreprendre, ma gloire réside dans cette initiative qui me donne à penser que le dilettantisme reste un fanatisme à rebours.

Tout date dès lors que le gigantisme exténue jusqu’à la plus petite parcelle de conscience que l’objet nous impose.

J’en veux à chacun de me précipiter dans la parole, j’entreprends de vivre comme frappé par l’insupportable erreur de me souvenir du plus petit juron, ne fut-il pas exaltant.

La vie reste une option de la matière qui s’est préparée pour de plus grands projets.

Nul doute que toute objectivité passe par l’inavouable saloperie de l’image et des actes que l’on a traités comme tels.

Quelle déception que l’humilité, j’aurais dû vociférer, tout dégrader jusqu’aux veuleries ; je n’ai rien gagné à rester en dehors, à l’écart de tout, je veille sur toutes les maladies de l’existence en ne générant que des apparences .

Je ne fais rien qui vaille, je ne suis pas encore saisi par la vie.

Chiens de salut, est présent à nos yeux tout ce qui nous illumine, puis aussitôt se dispense d’être.

Quand tout m’apparaît vain, être en vie me trouble et m’oblige à quelques stérilités.

J’écris pour m’adresser.

Comme je n’ai aucun but, exister m’apparaît comme une révélation.

Je me consolide à mes périphéries.

J’écris par dégoût d’un dégoût plus grand encore, j’ai le sentiment d’être habité par une incompréhensible lassitude qui me représente comme un désabusé, un pleutre, qu’un Dieu sans expérience a lâché pour lui tourner aussitôt le dos.

Qui êtes-vous, je suis un incurieux qui rend curieux les autres?

Tout ce que j'ai considéré comme m'étant étranger, m'a un jour atteint par là où il y a suffisamment de place pour l'entendement.

Toute connaissance est illusoire dès lors que nous nous y adonnons pour d'infructueuses vertus publiques.

J'ai longtemps cru que l'univers tout entier, n'était que la réduction d'un Dieu qui cherche à évoluer, plein de rage et d'expansion.

S'il faut sans cesse se dépasser,je préfère rester en marge, et ma vie durant m'enfoncer dans la confusion de la réalité et du mensonge.

Utopiste confondu dans le contenu de vivre,voici l'homme ,avec ses regrets,ses remords ,ses sanies et ses insanités,et combien il fait dans le pathétisme,pour se donner le visage d'un saint anéanti par ses certitudes infestées de féodalités..

L'amour a trop à faire avec les organes,c'est en cela que je préfère le sentiment de l'amour qui préfigure de l'amour..

Mon mépris de ce que l'homme a falsifié,se fortifie dans ce cinquantenaire que je voudrais fêter comme un jamborée.

Rien en dehors de l’idée de la mort et du suicide,ne m’aura tant préoccupé,et je ne m’y suis épuisé que pour davantage en sortir en adulte gâté,à qui sont venus des stigmates ,de la rétention,comme s’il avait vieilli de dix ans en une seule journée...

Perception,tortionnaire dégoûtée et dégoûtante que la vie projette dans l'homme pour lui donner à croire que tout ce que nous voyons est en guenilles de réalité .

Les modernes de quelque utilité qu'ils soient nous enseignent comme d'antiques maîtres montés sur des estrades qui ressemblent à des échafauds.

Cette sensation presque humaine qui nous mène,nous dirige,que nous appelons le sentiment,le voici qui d'actes en acceptation de ceux ci,se substitue à l'idée d'un bien être qui ne passerait que par dessous nos ceintures.

L'art,une empathie instantanée,pour de la transfiguration.

Entretenez moi de choses dont vous vous entretenez lorsque je suis absent,me suis absenté,c'est à dire hors de moi.

L'enfer,une façon de voir de l'excès,de l'excessif,en tout point et toute chose.

Je vais et j'avance dans la vie en maudissant ce soleil qui fait réfléchir chaque étoile,les sélénistes,mais pas ces hommes obnubilés par d'autres éclaircissements.

Les imposteurs ont toujours d'excellents arguments.

Le chagrin a pour talent de tout rendre sacré ou satanément divin.

Toute tragédie devient populaire dès lors qu'elle s'inscrit dans l'opprobre du verbe.

J'ai accepté cette culpabilité qui me va comme un gant et à d'autres comme des mitaines.

Combien de puanteurs, de nausées, de crispations nous imposent ces musiques que nous trimballons comme des viatiques et qui ne sont que pourritures d'un esprit inavoué qui n'a su évolué en de justes places.

Dieu ne fait que son devoir,il survit.

Appréciez l'amour et appréciez autant les exquises sensations et suavités des puanteurs d'après la rose.

S'ennuyer in folio..

La vérité travaille dans l'ombre ,dans les antichambres où des valets assermentés lui cirent les pompes pour autant de marches funèbres que de glorieux combats.

La vie,c'est toujours mieux chez les autres.

Oblitérez Dieu et vous obtenez un sceau de discorde et de discernement.

J'ai plus de mots à rogner que d'humanité à chérir pour la porter vers les missels et les bréviaires.

Toute cette mémoire de soi qu'on voudrait effacer, qui nous affleure et nous effleure jusqu'aux égratignures, combien a t elle gardées de nuits où nous avons été réfractaires à nous-mêmes ,à nos dédoublements, et semblables à tous ceux qui n'ont n'en pas été dupes.

L’arrogance débite d’elle-même des inepties qui retombent en lieux communs, sitôt qu’on y réfléchit au nom du n’importe quoi et du n’importe comment.

N'ayant défendu que de hautes idées, je n'ai voulu dresser que sur des cathédrales les oriflammes de la foi et de mon aveuglement..

Mon patrimoine est dans la faillite et rien d'autre .

Dérangé dès le début du jour, et par la marche même du temps, comment ne pas vouloir être soul et tout saboter sans quelque hésitation que ce soit...

Réveillé avec cette phrase en tête:quand mon père ouvrait la porte je devais m'occuper à ne sonner personne .

Toutes les choses que j'ai considérées comme inoubliables sont aussitôt tombées parmi les détritus;j'explique par cette prédestination que je n'ai rien voulu enfreindre qui ne se soit mué en supercheries.

Le rien n'est pas abrupt au milieu du néant.

Faut il que je demande pardon de n'avoir insulté personne.

Dans mes accès de colère je ne franchis que le seuil de mes extrêmes pauvretés .

 Lorsque on est entré dans l'humanité, on ne peut plus s'en tirer qu'avec la curiosité de l'au-delà.

Vivre nécessite une forme de désenchantement, qui vient avec l'âge et s'appuie sur nos propres déconsidérations.

Les bassesses du monde sont dans tant de prolixités, que d'emblée elles nous incitent et initient à de purulentes réflexions.

Mon corps, et cela depuis des décennies, répugne à de la nouveauté.

Perdre connaissance dans et par la musique ,comme devant toute oeuvre, relève de quelque chose d'orgasmique, comme si nous avions à crever dans du leurre.

La phrase s'est précisée dans le heures qui suivirent:et si je devais penser aux petites filles nègres abandonnées et les panser.

A mes yeux vivre consiste en la maîtrise de ses divagations, et des fictions qui nous rachètent d'être entrés dans l'existence par la porte étroite .

Quoique j'ai réussi, je lui ai toujours préféré cette terrible vacuité qui précède le moment de commettre.

Circuit d'homme et de bête imprimée, me voilà raisineux, contre une stèle sans inscription, las si las, qu'aucune indécence ne m'atteint plus .

Au plus haut degré de tout son être ,chaque homme en devenir devrait se contenir de tout vouloir homologuer, pis, de rester dans sa chair, empénétré d'une souffrance à son goût, de peur que cette même souffrance n'aille s'appliquer à d'autres.