Aphorismes 153

Du lointain à venir où s'élaborent mes vides, je n'ai aucune image, me restent les niaiseries liées au prestige d'y penser avec des métaphores.

Je me suis arrêté entre la réussite et la tentation qu'offre le jeu de ne pas y parvenir, je me suis transformé en générateur de hâte, je me désole aujourd'hui de ne m'être davantage acoquiné à ces virtuosités.

Tout en moi, prête à l'impureté et à l'impunité qui y est associée, nul ne sachant d'où toutes deux sont issues, me voici en possession d'un secret pesant et innommable.

J'ai façonné, conçu, et pour moi seul un univers de peurs; je m'y suis englouti, reste l'onde pour en dénoncer toutes les noyades.

Et pour ne plus me pencher sur moi, je me suis inventé des lordoses...

Indigent, de tout et en tout, seules me restent les larmes pierreuses de mon corps.

Abandonnant tout et tous, vers quelle ignominie je cours et qui m'agrémente en rien?

De quel esprit endolori et qui circule en moi, nait ma pensée, aussitôt dissoute quand elle se vautre dans mes profondeurs.

Tant de constructions mentales qui s'étagent dans cette même incompatibilité qui fait tragiques les maladies et impossibles leurs guérisons.

A trop prier, je suis devenu un parasite de Dieu.

J'accuse le monde de vouloir que je me dérobe à lui.

Malheureux, voilà mon seul présent, faudra t'-il que je vide mes veines pour en goûter l'authenticité?

Me reste le dérèglement des sens pour m'user déséspérement, jusqu'à ne plus pouvoir me servir de mes armes; discernement et raison, pour de grossières évasions à commettre quand je me suis appuyé sur les excès, tous les excès quimènent à l'impatience et à l'impertinence et qui ne m'ennuient pas.

Un supérieur ennui, pour la plus noble des maladies.

C'est dans une répugnance ininterrompue que je vis, répugnance des êtres, des histoires, des mots, des humaines chiotteries; seule ma santé me permet de ne pas sombrer dans leurs infernales insalubrités,superficialités de ceux qui sont sans mal.

Sortis de la douleur, de quelle crasse obligée pouvons-nous témoigner, sinon de toutes les conciliations?

La douleur serait une recomposition de toutes mes faiblesses, que ma faiblesse même me mettrait dans toutes ses directions.

J'ai détourné des désirs, tensions ineffables, à des fins ostentatoires, à des suicides entachés de vivre, sans les complications inhérentes à l'esprit qui s'abaisse.

Chaque heure m'est une fatigue qui perle verticalement dans le sens de m'allonger.

Tant tout pèse, que mes équilibres sont de l'ordre d'une dernière miséricorde où j'articule de l'existence pour des élans inconsidérés.

J'aurais réduit ma vie à des obligations, et jusqu'à la maladie, mon corpsn'aura été que le portefaix de ces représentations où ma déficience était la seule incertitude qui vaille qu'on la considère.

Lorsqu'on est seul à l'égard de soi, les autres ont déjà disparu à jamais, ou se sont éteints, mais si près de nous, si près...

Je dis parfois des mots qui témoignent de ma terreur d'être, et se posent dans l'obscurité des hommes pour des vertiges qui accablent leur condition.

Etre un évènement dans les imperceptibles soubresauts de la conscience, quand elle cherche sa place parmi les morts.

La mort je la vois comme la seule intimité qui tienne un commerce dans un bordel, et s'arrange de celui de ses latrines. Il est vrai, qu'en apparente réserve, j'ai voulu me reconnaître des avantages que seule l'hébétude réhabilite par ses muettes contemplations.

Autant dire que le verbe est si haut, si fort, que c'est la seule musique dont l'aide violente se consomme sans savoir.

Ma dernière bouffée d'oxygène aura le goût amer d'un poison définitif.

Ma vitalité, je la dois à ce corps qui se questionne en démentant continuellement les farces de l'existence, celles où l'on se piétine soi-même.

Minérales, mes incertitudes ont grandi par dessus mes douleurs, jusqu'à l'apoplexie, en passant par la contribution de toutes mes purulentes matières à réflexion. Nous exagérons ces innocences muettes qui se traduisent par du rêve, s’irisent en lui, jusqu’à ces réserves où nous jouons à des abandons, pour des inconforts aussi froids que si nous regardions le ciel avec nos yeux gelés, pour n’y voir que des chérubins qui salivent et qui bavent.

Tout ce que j’ai conçu dans mes afflictions n’a pas supporté la clairvoyance de mes pairs, et s’est éteint dans la même indifférence qui se noue à mes entrailles et me brouille avec moi-même.

Personne ne m’excusera d’avoir été un homme qui ne tenait à la vie qu’en passages, comme pour parodier des éternités douteuses figées sur des lignes et des toiles.

Nous devrions nous rencontrer dans le désir de n’être plus, et différer nos existences dans l’illusion d’un autre devenir.
Tous les jours, altéré par ce mieux imprenable, je cherche dans l’existence un lieu pour y abuser de maintes beautés mortes, que je porte encore en moi par dérision et forfanterie.

Au-delà de cette mélancolie que je fréquente depuis que je suis sorti de l’enfance, il y a la crainte d’être un adulte qui se fatigue de ce qu’il étreint ou enserre.

Quoique j’ai exagéré, l’amour, l’épuisement, l’ennui, la langueur, j’ai toujours gardé sur eux les avantages d’une gratuité sans nom, et que je sais distribuer voire donner.

L’amour me met dans la position d’un besogneux de la caresse, que la nature oblige aux sudations autant que dans une dévastation, affection suprême de ceux qui se prosternent devant des idoles sans aspérités.

Dans mes soliloques je m’entretiens avec toutes les ironies d’un devenir sans prospection, avec celles que j’élevais pour des vétilles, puis pour des crimes sans commanditaire.

Tout devient Dieu sitôt qu’on l’approche avec des larmes.

Toutes les souffrances sont insalubres.

Du détachement, rien que du détachement ,du détachement et l’ancienne banalité d’un désespoir sans commandes.

J’aurais tour raté jusqu’à cet intérêt que je vouais à l’existence quand j’étais inculte.

Dans mon univers de peurs et de néants, mes interrogations sont sans perspective, et mes réponses sans lucidit


Au crépuscule de cet être que je regarde crever, et qui prie..


Brouillard matinal, café, le temps est dans cette emprise que les boulevards tournent en vulgarité, c’est ainsi que ma tristesse se charge de déceptions.


Plus je consens à la vérité, plus je me vois en épave réflexive, que la conscience rend à l’immanence d’un devenir sans fraîcheur et sans amour.


J’ai été séduit par des filles sans connaissance qui ses sont penchées sur la mienne pour n’y voir que les infectes traces d’un trublion aspiré par ses grotesques raffinements.


Ma fainéantise comble ma suffisance, toutes deux s’affranchissent du poids qui me forçait à y penser.


La maladie est une des dimensions tragiques du savoir, lequel, celui qui nous met dans la torpeur d’être, et rien d’autre.


Toutes les nuits supportent mon tourment, comme une femme alanguie et qui pardonne ;le jour quant à lui est un trop plein de cette vie qui m’exaspère jusqu’aux hémorragies de souvenirs et de remords.


Au dessus des pensées qui suggèrent le vide, du néant, toute chose diffuse qui sent l’excès ou la naphtaline, puis la pâleur de tous ces sentiments qui nous ont conduit à douter, à douter et à redouter.


Nos naissances sont des contaminations, mieux eût valu ne pas naître ;bref, n’être point, nous ne serions aujourd’hui que de l’azur en cloques, un mélodieux chaos, un vague altéré par tous les jugements que nous auraient portés ceux qui sont.


J’erre grave et superficiel dans une vie où ne fermentent que du confort ou de l’assassinat.


Tout ce qui est à distance des hommes est à distance de Dieu, et par là même inconsolable d’avoir été crée, inconsolable d’être et de devenir.


Je cherche dans l’homme ce à quoi il aurait renoncé s’il n’avait été que cette chair et ce sang qui participent à ses vertiges et à ses prosaïsmes.


Chaque jour qui me vient, se profile en moi un suicide que je repousse faute d’y penser avec de la profondeur.


Je range mes soudaines vitalités parmi de similaires paresses, qui toutes deux me donnent l’apparence d’un être obnubilé par ses primautés et ses façons de gaspilleur qui ne sait où vivre et comment.


Ce qui est constance en moi est l’idée d’un mort porté en terre un matin brumeux, dans un cercueil ceint d’aubépines et de pleurs, parmi toutes les pouffiasses atteintes de cécité.


Lorsqu’on déplace sa vie de langueurs en ennuis, tout ici bas meurt dans le prosaïsme des matières destinées à ne pas être prises en mains.


Que chercher parmi les hommes qu’on n’ait pas trouvé, si ce n’est cette insanité, mirage des notes et des mots.


Ma paresse ,j’y goûte à chaque fois qu’elle retombe, et que je dois vaquer verticalement parmi les hommes, parmi leurs éboulements.


La matière de mes ressentiments est une trace physique, écarts et écartèlements dans un demi sommeil, sous des pierres répandues comme après une lapidation.


Je me suis enténébré dans de sombres secrets comme en une femme, dans du veuvage, de la nostalgie, de la musique, après, après je me suis endormi dans d’ignobles manières.

Tout ce qui vient de moi et va vers les présences est voilé d’une discrète douleur, inscrite dans la matière même du plus infimes de mes atomes.


J’ignore jusqu’où je me suis borné.