Aphorismes 66

Je pourrais me passer de tous ceux qui m’ont détraqué, j’en ai la certitude ;je travaille à m’en approcher pour mieux pratiquer la folie ou quelque sainteté qui lui ressemblerait.

Il me suffit de croire que toute folie prélude à des suicides directs ou indirects, pour aussitôt m’y diriger en me dévaluant

Rendre service c’est se vicier au point que tout acte dont le bénéfice devrait nous revenir paraît insalubre.

Toutes les certitudes nous empêchent de voir clair.

Être, c’est céder à la tentation de vouloir être et de le rester.

Le dégoût de nous-mêmes est un moyen de se soucier des autres et de leurs dégoûts.

Vie :trop plein de la matière, dégueulis des origines, épanchement de Dieu.

Le silence incline à la lice.

Secondaire, essentiellement secondaire, je puise dans mon néolithisme ce qui un jour me révèlera.

Spectateur imparfait d’un présent qui se coule sans y parvenir dans des gloses ordurières, aucune de mes répliques n’aura ses essences dans le mode inférieur de la parole.

Les nuances participent de l’effacement et du retrait, autant dire d’une modestie incarnée en décharge.


Tous les artifices nous survivent, au spectacle permanent de nos simagrées, préférons l’idiotie inhérente à nos actes, et cet insupportable besoin d’être déçus ou incontentés.

Ma veine est d’être crispé, d’arriver au plus haut degré de la crispation sans en être excédé, voilà pourquoi mes outrances sont de l’ordre d’un manège et d’une révélation.

Ces instants d’avant l’instant, et dire qu’il a suffit d’un seul souffle d’une seule de mes secondes, pour à jamais le regretter.
Je m’éparpille à mes dépens, défunt j’aurais dans l’éternité cet air de parcellaire mais sans ses rafistolages.

Je m’épuise à perdre ma volonté, tant d’heures qui ne m’ont servi qu’à voir jusqu’où une malchance idéale aurait dû m’aider à servir la conscience d’être.

Je fonce dans le malheur comme si en dépendaient toutes ces maladies qui m’incommoderont au point d’en faire un « néanmoins » de la mort.

Manquant d’envergure, mes secrets retournés à leur limon d’anonymat, que me reste t-il pour être indisposé ,si ce n’est ce peu de raison, parodie d’une déveine à mon goût?

Ecœuré dès ma naissance, écœurement suspect dès lors qu’il est identique à tous, mais combien il m’ont aidé à sévir au nom du « non être ».

Combien j’exècre les sérieuses divinités éprises d’un portefaix, d’un sicaire, ou d‘un néant dont elle n’ont pas mesuré l’envergure.

Ce qui m’a conduit à la littérature m’en écartera, ainsi disposé à l’acte et à l’ambition, les mots s’écarteront de moi pour une perte dont je ne saurais me contenter.

J’ai en permanence le réflexe de la réflexion, après coup, après tous les coups je m’endors dans l’acte, je devrais dire dans l’irréparable, dans son irréparable.

M’est hostile tout se qui s’érige en dehors de toute réflexion, et fait figurer la vie comme une étincelle et non une éclaircie.