Aphorismes 44


Mon temps est un temps de perdition, vidé de toutes les substances qui prêtent au visible, c'est à dire vain et confidentiel.

Me racheter, oui mais de quoi, le prix que je paye à la vie, suffit déjà à y réussir.


Perdre le sommeil, ne plus être que dans une ténèbre,la sienne, voilà une belle idée de cauchemar.


Tout ce que j'ai relégué au second plan, s'est peu à peu rapproché de mon idéal, voilà pourquoi je fais cas de tous les transfuges.


Nos tristesses engendrent des scléroses qui nous rendent contagieux d'un sommeil qui n'est pas à notre mesure.


Une de mes paniques serait d'aller à reculons, sans y adjoindre la pensée d'une défaite.


Dans cette mélancolie qui gagne en avenir, j'ai parfois des élans de philanthropie, que je démesure jusqu'à d'insanes regrets.


Passer un chiffon sur l'Histoire, et dépoussiérer jusqu'aux gibets.


L'art nous prédispose à des dégoûts réussis.


Je réponds à la poésie par des épidémies d'injures, qui la convainque de troquer le mot pour du vandalisme.


Je fais dans le dilettantisme, le jeûne et la prière, avec la préciosité de quelqu'un qui peut s'évanouir autant dans une église que dans une sacristie, voire un bistro.


Rien que je ne me sois permis de cynique et qui ne m'ait conduit dans de la compassion.


Tout est vicié dès lors qu'il s'évapore dans des proportions que nous ne supportons que lorsque nous sommes ivres.

Aimer, c’est donner suite à ce virus d’exister.


Les mémoires déficientes sont les plus convenables.


N’avoir le recours à la parole qu’après les méditations ,ou les accès de folie, le reste n’est qu’une usurpation, un nouvel échec.


Mission :fait imbécile pour se donner une raison d’être.


J’use pourtant de cette indécence là, qui rend molles les convenances.


Survivre à la manie, au tic d’exister.


Exemple :la première des absurdités dont nous ayons besoin.


Rogner le .TU .de tous les côtés, à toutes ses surfaces ,pour se sentir mieux malaisé dans le JE.


Qu’y a-t-il d’effrayant dans le mensonge, outre qu’il fortifie toutes nos excuses d’exister, il est solidaire de tous les actes que l’on commet pour soi seul, à qui l’on donne le nom de survie?


Se désagréger dans la sagesse, et augmenter les vides ,tous les vides ,avec ce bonheur gras et lourd d’exister en dehors des mots et des images.


Ma place est à l’abri des souvenirs, rangé d’eux, plus de supercherie, le passé ne se présente plus à moi que sous la forme d’insomnies.


Ce sont les esprits tordus qui sont les plus aptes à donner la définition du nœud.


L’admiration est un des premiers degré de l’imbécillité , après on gravit les marches de la sujétion et des esclavages..


Espoir :suivez un cortège, un enterrement, voilà la réalité et la monstruosité de vivre qui nous poussent à espérer.


L’excès est le premier degré de l’être.


Ma gratitude parfois me confine dans des insomnies, tant il est vrai que je n’arrive pas à trouver le sommeil, que si je n’y ai ailleurs reconstitué le bienfait. 

Dans la carrière d’être, combien sont hommes de profession ? 

Le talent ne fait pas l’œuvre, le talent nous tient éloignés de cette douleur là qui fait grand, tout ce que nous avons craint petit. 

Je crois et je suis comblé. 

Il arrive parfois que l’homme se trouve en inflation de la bête, la nature en est alors contrariée. 

Plus mon corps se détériore, plus j’opte pour les péripéties de l’Esprit et cette fatuité de sensations qui m’élèvent ou me rabaissent. 

La douleur s’ingénue à occuper tout mon vocabulaire, en dehors d’elle ne se reconstruisent en moi que les littératures d’obédience. 

Vivre, c’est se consoler d’être. 

Je ne discerne que ce qui fait que je me morfonds dans la peau d’un écorché. Toute lucidité est corrosive, l’homme de tristesse et de peine cherche tout, sauf à tricher sur cette même lucidité. 

On commence par une lettre, on finit par un testament, on commence par un cri, on finit par un crime.Nous nous entêtons dans tant de tristesses, dans tant d’abattements, quand il suffit d’un coup de revolver.


Convaincu que mes sottes et sombres misères sont consécutives à cette fatigue de l’existence, je proclame parfois que je suis né vaincu, et que je ne cherche aucune victoire qui n’aurait pas de nom. 

Nous avons dissout nos diables jusque dans nos plus petits crachats, pourtant dorment dans nos cellules d’autres démons plus infatués encore. Je bouge, je vais, j’avance, je dispense du geste à mon corps pour ne pas me couvrir dans l’illusion d’être sans faire.


Renoncer à tout, sauf à me tromper, être dans l’erreur, ou dans les fausses vérités, voilà à quoi je me suis prédisposé. 

La parlotte fait l’inventaire des monologues que notre fainéantise a tourné en dérèglements. 

Rien de profond qui ne me persuade de l’être moins. 

Plutôt fossile que vivant ! 

L’inconscience comme une grande partie de toutes nos voluptés, comme la plus grande des futilités et qui dure.