Aphorismes 40

C’est ma discrétion qui m’a fait si éprouvé, éprouvé mais avec du marasme.


La fatalité s’exerce dès lors qu’on a plus rien à espérer ou à simplifier.


Combien j’ai pu m’anéantir de douleur qui ne venait pas de l’esprit.


L’ennui préside aux abandons.


De ma tristesse j’ai tiré des thèmes pour bricoler dans l’humain et l’asphyxie.


Rien n’a pu me raccrocher à la lucidité et mon cauchemar tient autant à cet intellect confondu à de la supercherie, que de mes recréations.


Vivre serait raisonnable si nous raisonnions.


Je me rachèterai de l’illusion de dormir par mes corrections et mon refus du bricolage.


Ce qui me revient de droit s’émiette sur des terrains vagues où d’autres s’exercent au crachat.


Vivre c’est se ramollir d’énigmatiques rêveries.


Rien qui ne m’ait concerné et qui n’ait sollicité de la raison ou du surnaturel.


Conscient de tous ces vides érigées en absences, ma stupeur naît de ce savoir et de ma verticalité.


Crétin que la science dépassionne, quel autre pouvoir pourra me dispenser une dépression à ma mesure ?


Les extrémités triomphent au point de chute.


Conscient qu’étant incurieux je reste vide, il m’arrive de vouloir me diffuser, mais vers où , mais vers qui ?


En villégiature dans un corps ambigu, je mets plus de temps que le commun des mortels à fonctionner comme un aventurier ou comme un notaire.


Tant de lucidité pour ne voir que ce qui l’atténue, pour ne voir que la stupide inertie des troglodytes que nous sommes.

J’ai opté pour de l’insupportable comme on opte pour une profession, me restent les vaines promesses liées à cette vitalité.
Rien en dehors de l’inertie ne prête à mes obsessions.


Toutes ces identités où j’ai été à mon avantage, combien elles sont insanes, combien elles m’ont donné le remords de l’indésiré.
Je n’ai rien besoin de créer qui s’adonnerait au jugement ou à la démesure.


J’ai survécu aux questions par cette impertinence qui aurait tout autant pu me racheter d’avoir été terrorisé par celles là même.

Indisposé par tout et par tous, mais jouant avec la matière, mais remuant de la vie jusqu’à en tirer du symptôme.


L’ennui a donné à mes infirmités une forme de convoitise que j’appelle le crédit du mourant.


L’occident s’est appliqué à créer des bourreaux qui n’ont pu donner aucune explication sur l’inconcevable.


Faillir, mais en se défendant.


Parfois si désespéré pendant un bref instant que j’ai le sentiment d’être en expansion de temps.


Que rien ne me fasse accéder au bonheur ne m’étonne guère, ce qui m’étonne c’est de si bien m’en satisfaire pour atteindre à l’essentiel d’un autre phénomène.


Mon corps s’est affirmé par ses angles et ses amertumes.


La permanence du zéro s’étend si loin, que personne ne songe à le précéder.


Il me vient parfois à l’esprit que si je bavardais, je baverais moins.


Je n’ai encensé personne, c’est une version de cet effacement auquel je me suis voué pour n’être point imité.


Être est une belle trouvaille qu’à l’évidence nous voulons tourner en performance d’une omniscience et d’une omnipotence sans nom.


La petite fatigue m’apparaît comme une fraude, la grande comme une trahison.


Tous mes projets furent des éclairs impropres à dégager quelque lumière que ce soit.


Je jure qu’après m’être entendu, j’ai envie de vomir ou de me flinguer.


Dans mes enfers, et sur ce point je ne cèderai pas, il y a l’évidence de la mort, mais aussi ce qui la rend supportable.


Être, c’est revenir de tout mais en rétif.


Mes convictions m’ont amené à déguerpir des lieux où toutes mes velléités auraient dû me détourner de la parole.


Sous l’effet des somnifères mes organes se défont comme pour remédier à la fainéantise de les atteindre en me flinguant.


Le vrai est un sentiment dont je n’ai jamais eu à débattre.


L’ailleurs à y regarder de près prête à la raillerie.


J’aurais gaspillé des années à des profondeurs dont je ne suis revenu qu’en manquant de souffle.


Parfois certains soirs, me prêtant à des extases alcoolisées, il me semble que je parviens à entrer dans la peau d’un autre, et me dégoûte autant que si j’étais resté dans la mienne.


Les cadavres nous donnent des explications inespérées sur l’infini..


Entrer dans la colère par les glandes, en ressortir en trou du cul.


Ma vitalité tient parfois de l’hospitalité et du crime.


Toute une vie pour réussir à périr honorablement.


Au flingue je préfère le poignard pour chouriner et voir jusqu’où la chair nous soutient.


J’aspire à des paix que j’exècre aussitôt de peur d’y mourir éthéré.


J’assiste à des exécutions où j’ai été juge et bourreau, sans supposer que je puisse en être affecté.


Tant de théories coïncident avec ce que nous espérons, que nous pouvons nous tromper mille fois et toujours retomber sous le coup d’un bon sens quelconque.


Je suis aux antipodes du rire, mais pour une grogne aussi vénéneuse que vénérienne.


J’ai hérité d’une gloriole que la diane a aussitôt camouflé tant elle s’approchait de l’homélie.


Je ne souscris à rien qui aussitôt s’échappe en effervescence de l’esprit, j’ai plutôt en considération tout ce dont je m’accommode pour rester en dehors du monde, tel un adulte gâté.


Indéniable faillite de la matière, regardez l’homme et vous détesterez toutes ses géologies.


Comme je n’ai plus accès à ces heures où je m’accomplissais dans chacune de mes affirmations, j’ai choisi de faire œuvre de silence, et de ne me défroquer que pour une putain ou une religion.


Tout ce que j’ai tu s’est dépravé dans l’exercice de  ce silence où j’ai eu une haute opinion de ceux qui ont choisi de traverser un enfer et de le célébrer par la suite.